• L’église catholique renonce peu à peu à la théorie de la guerre juste, invoquée pour justifier certains conflits, et promeut désormais une culture de non-violence.

    Qu’est-ce que la guerre juste ?

    La guerre juste est une notion antique, exprimée notamment au Ier siècle av. J.-C. par Cicéron, reprise par les Pères de l’Église (notamment saint Augustin) puis formalisée au Moyen Âge par saint Thomas d’Aquin. Selon lui, pour qu’une guerre soit juste, trois conditions devaient être remplies : être déclarée par une autorité légitime, pour une juste cause (réparer une injustice ou se défendre contre une agression), et s’en tenir à une intention droite (rétablir la justice et non assouvir une vengeance).

    Au XVIe siècle, le jésuite Francisco Suarez ajoutera qu’une guerre juste doit avoir une chance raisonnable de succès et rappellera qu’elle ne peut être envisagée qu’en dernier recours. De leur côté, les dominicains Raymond de Peñafort (XIIIe siècle) et Francisco de Vitoria (XVIe) ont insisté sur le droit de la guerre, rappelant les principes de proportionnalité (ne pas commettre un tort plus grand que le dommage à réparer) et de discrimination (ne s’en prendre qu’aux combattants).

    L’Église a-t-elle changé sa position ?

    Malgré l’apparition des États-nations et le concept de raison d’État, l’Église ne va jamais cesser, jusqu’au XXe siècle, de défendre la théorie de la guerre juste. Mais les deux guerres mondiales (notamment la seconde) et le développement des armes de destruction massive (au premier rang desquelles l’arme atomique) vont la pousser à évoluer. « Ausch­witz et Hiroshima rendent caduque et indéfendable l’idée d’une guerre pour défendre une cause », résume le père Bruno-Marie Duffé, secrétaire, au Vatican, du dicastère pour le développement humain intégral. Pour lui, « la seule cause est la défense de la vie, qui suppose plutôt une ”anti-guerre” ».

    Alors que Léon XIII définissait déjà la guerre comme un « fléau » et que Benoît XV la qualifiait de « massacre inutile », le concile Vatican II va aller plus loin. « Tout acte de guerre qui tend indistinctement à la destruction de villes entières ou de vastes régions avec leurs habitants est un crime contre Dieu et contre l’homme lui-même, qui doit être condamné fermement et sans hésitation », insiste Gaudium et spes (n. 80). Dans ce qui constitue sa seule condamnation explicite, le concile appelait à « reconsidérer la guerre dans un esprit entièrement nouveau » et à préparer le jour où « toute guerre pourra être absolument interdite » (n. 82).

    « Dans ces conditions, on ne peut plus aujourd’hui parler de “guerre juste” et j’écarterais l’expression, qu’on ne voit d’ailleurs plus depuis un certain temps dans le Magistère, pour celle d’utilisation légitime de la force par les États pour se défendre », résume Christine Jeangey, responsable de la question au dicastère pour le développement humain intégral.

    Quelles sont les conditions de la violence légitime ?

    Pour Christine Jeangey, l’approche de l’Église en matière d’utilisation légitime de la violence est une mise en œuvre du cinquième commandement : « Tu ne tueras point. »« Pour la protection de la vie des individus et de la communauté humaine, il peut y avoir un recours à la violence », explique le père Duffé, selon qui « sous certaines conditions, un État a même le devoir de protéger son peuple ».

    Le Catéchisme de l’Église catholique souligne ainsi « les strictes conditions d’une légitime défense par la force militaire ». « Il faut à la fois, souligne-t-il, que le dommage infligé par l’agresseur à la nation ou à la communauté des nations soit durable, grave et certain ; que tous les autres moyens d’y mettre fin se soient révélés impraticables ou inefficaces ; que soient réunies les conditions sérieuses de succès ; que l’emploi des armes n’entraîne pas des maux et des désordres plus graves que le mal à éliminer » (n. 2309).

    « Ces conditions sont les mêmes que celles de la guerre juste, mais cela ne veut pas dire que l’Église reprend la théorie de la guerre juste », estime Christine Jeangey qui insiste sur le droit de la guerre, une fois celle-ci engagée. « Ce n’est pas parce que la guerre est malheureusement engagée que tout devient par le fait même licite entre les parties adverses », résumait Gaudium et spes (n. 79).

    L’Église peut-elle aller plus loin ?

    Selon Pax Christi, la théorie de la guerre juste continue à être enseignée dans certains secteurs de l’Église. D’autant plus que le Catéchisme emploie encore ce mot, même si c’est pour se borner à relever que ses conditions de la légitime défense « sont les éléments traditionnels énumérés dans la doctrine dite de la ”guerre juste” » (n. 2309). En 2016, le mouvement catholique a donc demandé au pape de supprimer définitivement ce terme. En août dernier, les religieux américains ont, de leur côté, invité le pape François à écrire une encyclique sur la non-violence. « Résolus à répondre concrètement à l’appel de Vatican II pour mettre la guerre “hors la loi” », ils appellent également l’Église à « cesser de justifier la guerre ».

    À Rome, ces appels sont écoutés avec une oreille bienveillante. « La guerre juste est abandonnée, au moins implicitement », reconnaît ainsi le père Duffé qui met toutefois en garde contre une vision non-violente qui délégitimerait l’action de ceux qui, sur le terrain, sont aux prises directes avec une violence à laquelle ils doivent faire face comme ils le peuvent.

    « Attention à ne pas mettre en difficulté ceux qui s’impliquent dans les institutions et la vie publique : il faut permettre un va-et-vient entre le croire et l’agir », souligne-t-il, posant aussi la question d’une autorité internationale capable d’arrêter les conflits. « Si la guerre juste n’existe plus en tant que telle, la réalité des abus de pouvoir demeure, constate-t-il. Or il faut tout faire pour éviter la violence et sauver des vies ! »

    Plutôt que de s’enfermer dans une posture morale déconnectée de la réalité, le Vatican préfère donc s’engager aujourd’hui dans la promotion d’une culture non-violente. En 2017, le pape François avait justement consacré son message pour la Journée mondiale de la paix, le 1er janvier, à « la non-violence, style d’une politique pour la paix ». Dans ce sillage, le Vatican ne ménage pas ses efforts pour développer dans le monde une culture non-violente, que ce soit en promouvant le désarmement mais aussi le développement pour éliminer les causes des conflits.

    N Senez (la croix)


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  • Une étude annuelle du bureau maritime international montre qu’en 2017, 180 actes de piraterie ont été recensés dans le monde, soit 11 de moins qu’en 2016. La zone la moins sûre du globe reste l’Asie du sud-est.

    Les mers ont été plus sûres en 2017. C’est le constat qui ressort de l’étude annuelle du Bureau International Maritime (BIM) basé à Londres. Entre janvier et décembre, 180 actes de piraterie réussis ou tentés ont été recensés à travers le globe.

    Les actes de piraterie ont donc diminué cette année encore, enregistrant sa 5e année de baisse après des années 2014, 2015 quasi stables. Depuis 2013, la piraterie a baissé d’environs 30 % sur l’ensemble de la planète.

    Les actes de piraterie en baisse dans le monde

    Trois régions du monde restent toutefois des endroits sensibles pour la navigation maritime. Avec en premier lieu, l’Asie du sud-est où pas moins de 76 actes ont été déclarés, soit 42 % des attaques du globe. Le pays le plus risqué pour les navires reste l’Indonésie avec 43 actes de piraterie suivi des Philippines, avec 22 attaques.

    Menace toujours présente des pirates somaliens

    L’autre point sensible du monde reste l’Afrique avec 57 attaques enregistrées sur le continent. La grande majorité d’entre eux se situent au large du Nigeria, avec 33 actes recensés. À l’est du continent, la Somalie continue de voir les pirates sévir sur leurs côtes. Seuls six événements figurent dans le rapport mais, ils ont été, à chaque fois d’une rare violence.

    De plus, d’autres actes dans la région sont imputables aux pirates somaliens car ils agissent souvent au large et alors que les bateaux sont en rythme de croisière. « Les incidents de 2017 montrent que les pirates somaliens gardent la capacité d’attaquer des navires marchand à plusieurs centaines de kilomètre de leurs côtes » s’inquiète Pottengal Mukundan, directeur du BIM.

    Le mode opératoire distingue d’ailleurs les actes de piraterie d’Asie et ceux d’Afrique. En Asie, la majorité des attaques se font sur des bateaux à l’ancre. Tandis qu’en Afrique, plus de 60 % de la piraterie s’effectuent sur des navires en navigation.

    Un nombre de décès en hausse

    Le dernier endroit du monde touché par les actes de piraterie est l’Amérique du Sud avec 24 actes notifiés dans le rapport. C’est le Venezuela qui capte la majorité de ces attaques au nombre de douze, suivi par la Colombie.

    Si la piraterie commise dans le monde a globalement diminué en 2017, elle a aussi connu un léger pic meurtrier avec trois décès enregistrés alors qu’il n’y en avait pas eu en 2016 et seulement un en 2015.

    En ce qui concerne les pays de rattachement des bateaux touchés par la piraterie, Singapour fait figure d’État le plus touché avec 56 navires attaqués. Pour compléter le podium, 22 navires attaqués étaient dirigés depuis l’Allemagne, ainsi que 22 autres rattachés à la Grèce.

    Enfin globalement, ce sont surtout des bateaux de taille importante qui sont pris à partie avec 23 conteneurs et 61 tankers, transportant des produits chimiques, pétroliers ou gaziers.


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