• L’église catholique renonce peu à peu à la théorie de la guerre juste, invoquée pour justifier certains conflits, et promeut désormais une culture de non-violence.

    Qu’est-ce que la guerre juste ?

    La guerre juste est une notion antique, exprimée notamment au Ier siècle av. J.-C. par Cicéron, reprise par les Pères de l’Église (notamment saint Augustin) puis formalisée au Moyen Âge par saint Thomas d’Aquin. Selon lui, pour qu’une guerre soit juste, trois conditions devaient être remplies : être déclarée par une autorité légitime, pour une juste cause (réparer une injustice ou se défendre contre une agression), et s’en tenir à une intention droite (rétablir la justice et non assouvir une vengeance).

    Au XVIe siècle, le jésuite Francisco Suarez ajoutera qu’une guerre juste doit avoir une chance raisonnable de succès et rappellera qu’elle ne peut être envisagée qu’en dernier recours. De leur côté, les dominicains Raymond de Peñafort (XIIIe siècle) et Francisco de Vitoria (XVIe) ont insisté sur le droit de la guerre, rappelant les principes de proportionnalité (ne pas commettre un tort plus grand que le dommage à réparer) et de discrimination (ne s’en prendre qu’aux combattants).

    L’Église a-t-elle changé sa position ?

    Malgré l’apparition des États-nations et le concept de raison d’État, l’Église ne va jamais cesser, jusqu’au XXe siècle, de défendre la théorie de la guerre juste. Mais les deux guerres mondiales (notamment la seconde) et le développement des armes de destruction massive (au premier rang desquelles l’arme atomique) vont la pousser à évoluer. « Ausch­witz et Hiroshima rendent caduque et indéfendable l’idée d’une guerre pour défendre une cause », résume le père Bruno-Marie Duffé, secrétaire, au Vatican, du dicastère pour le développement humain intégral. Pour lui, « la seule cause est la défense de la vie, qui suppose plutôt une ”anti-guerre” ».

    Alors que Léon XIII définissait déjà la guerre comme un « fléau » et que Benoît XV la qualifiait de « massacre inutile », le concile Vatican II va aller plus loin. « Tout acte de guerre qui tend indistinctement à la destruction de villes entières ou de vastes régions avec leurs habitants est un crime contre Dieu et contre l’homme lui-même, qui doit être condamné fermement et sans hésitation », insiste Gaudium et spes (n. 80). Dans ce qui constitue sa seule condamnation explicite, le concile appelait à « reconsidérer la guerre dans un esprit entièrement nouveau » et à préparer le jour où « toute guerre pourra être absolument interdite » (n. 82).

    « Dans ces conditions, on ne peut plus aujourd’hui parler de “guerre juste” et j’écarterais l’expression, qu’on ne voit d’ailleurs plus depuis un certain temps dans le Magistère, pour celle d’utilisation légitime de la force par les États pour se défendre », résume Christine Jeangey, responsable de la question au dicastère pour le développement humain intégral.

    Quelles sont les conditions de la violence légitime ?

    Pour Christine Jeangey, l’approche de l’Église en matière d’utilisation légitime de la violence est une mise en œuvre du cinquième commandement : « Tu ne tueras point. »« Pour la protection de la vie des individus et de la communauté humaine, il peut y avoir un recours à la violence », explique le père Duffé, selon qui « sous certaines conditions, un État a même le devoir de protéger son peuple ».

    Le Catéchisme de l’Église catholique souligne ainsi « les strictes conditions d’une légitime défense par la force militaire ». « Il faut à la fois, souligne-t-il, que le dommage infligé par l’agresseur à la nation ou à la communauté des nations soit durable, grave et certain ; que tous les autres moyens d’y mettre fin se soient révélés impraticables ou inefficaces ; que soient réunies les conditions sérieuses de succès ; que l’emploi des armes n’entraîne pas des maux et des désordres plus graves que le mal à éliminer » (n. 2309).

    « Ces conditions sont les mêmes que celles de la guerre juste, mais cela ne veut pas dire que l’Église reprend la théorie de la guerre juste », estime Christine Jeangey qui insiste sur le droit de la guerre, une fois celle-ci engagée. « Ce n’est pas parce que la guerre est malheureusement engagée que tout devient par le fait même licite entre les parties adverses », résumait Gaudium et spes (n. 79).

    L’Église peut-elle aller plus loin ?

    Selon Pax Christi, la théorie de la guerre juste continue à être enseignée dans certains secteurs de l’Église. D’autant plus que le Catéchisme emploie encore ce mot, même si c’est pour se borner à relever que ses conditions de la légitime défense « sont les éléments traditionnels énumérés dans la doctrine dite de la ”guerre juste” » (n. 2309). En 2016, le mouvement catholique a donc demandé au pape de supprimer définitivement ce terme. En août dernier, les religieux américains ont, de leur côté, invité le pape François à écrire une encyclique sur la non-violence. « Résolus à répondre concrètement à l’appel de Vatican II pour mettre la guerre “hors la loi” », ils appellent également l’Église à « cesser de justifier la guerre ».

    À Rome, ces appels sont écoutés avec une oreille bienveillante. « La guerre juste est abandonnée, au moins implicitement », reconnaît ainsi le père Duffé qui met toutefois en garde contre une vision non-violente qui délégitimerait l’action de ceux qui, sur le terrain, sont aux prises directes avec une violence à laquelle ils doivent faire face comme ils le peuvent.

    « Attention à ne pas mettre en difficulté ceux qui s’impliquent dans les institutions et la vie publique : il faut permettre un va-et-vient entre le croire et l’agir », souligne-t-il, posant aussi la question d’une autorité internationale capable d’arrêter les conflits. « Si la guerre juste n’existe plus en tant que telle, la réalité des abus de pouvoir demeure, constate-t-il. Or il faut tout faire pour éviter la violence et sauver des vies ! »

    Plutôt que de s’enfermer dans une posture morale déconnectée de la réalité, le Vatican préfère donc s’engager aujourd’hui dans la promotion d’une culture non-violente. En 2017, le pape François avait justement consacré son message pour la Journée mondiale de la paix, le 1er janvier, à « la non-violence, style d’une politique pour la paix ». Dans ce sillage, le Vatican ne ménage pas ses efforts pour développer dans le monde une culture non-violente, que ce soit en promouvant le désarmement mais aussi le développement pour éliminer les causes des conflits.

    N Senez (la croix)


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  •  Un traité symbolique interdit l'arme nucléaire

    Plusieurs pays, Brésil en tête, ont lancé la signature d'un traité pour bannir l'arme atomique. Les grandes puissances le boycottent.

    Une cinquantaine de pays, Brésil en tête, ont lancé mercredi 20 septembre 2017 à l'ONU à New York la signature d'un traité à portée symbolique bannissant l'arme atomique. Ce texte a surtout une portée symbolique en raison de son boycott par les grandes puissances nucléaires.

    Elaboré en quelques mois, le traité a été adopté en juillet par 122 pays. Il doit entrer en vigueur dès lors qu'il aura été ratifié par 50 pays. Le président brésilien Michel Temer a été le premier à signer ce texte, et devait être suivi par les représentants de 50 autres pays.

    Mais aucune des neuf puissances nucléaires - Etats-Unis, Russie, Chine, Inde, Pakistan, Israël, France, Royaume-Uni, Corée du Nord - n'a prévu de s'y rallier. Les pays de l'OTAN sont aussi restés à l'écart, ainsi que le Japon, seul pays à avoir subi, en 1945, une attaque à l'arme atomique.

    Le traité d'interdiction des armes nucléaires a été ouvert à la signature mercredi au siège des Nations Unies à New York, le Secrétaire général, António Guterres, saluant une « étape historique » avec ce « premier traité multilatéral de désarmement en plus de deux décennies ».

    L'ONU juge que la menace nucléaire est à son plus haut niveau depuis la fin de la Guerre froide. « Il y a toujours environ 15.000 ogives nucléaires dans le monde », a souligné M. Guterres. « Nous ne pouvons plus laisser ces armes apocalyptiques mettre en danger notre monde et le futur de nos enfants ».

     

    Le but de ce nouveau pacte est de renforcer le Traité de non-prolifération des armes nucléaires, entré en vigueur en 1970, qui vise à éviter que la fabrication d'armes nucléaires ne se répande dans le monde, ainsi que le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), ouvert à la signature en 1996, mais toujours pas entré en vigueur. Le TICE n'entrera en vigueur qu'une fois ratifié par huit pays inscrits dans une annexe du document et qui ne l'ont pas encore fait. Ces pays sont : la Chine, l'Egypte, la République populaire démocratique de Corée (RPDC), l'Inde, l'Iran, Israël, le Pakistan et les États-Unis.

    Les supporteurs du nouveau traité estiment qu'il est temps d'aller plus loin que la non-prolifération nucléaire en bannissant définitivement la fabrication et la possession d'armes nucléaires, ainsi qu'en éliminant les arsenaux existants. S'il est mis en application, il rendra totalement illégales les armes atomiques, à l'instar des armes biologiques depuis 1972 et des armes chimiques depuis 1993.

    « Le traité d'interdiction des armes nucléaires est le produit d'inquiétudes grandissantes quant aux risques posés par l'existence des armes atomiques », a estimé M. Guterres. « C'est un pas important vers un but universel, celui d'un monde libéré des armes nucléaires ».

    La négociation du traité d'interdiction des armes nucléaires a commencé en mars ; 122 pays sur 192 l'ont approuvé en juillet. Parmi les plus fervents défenseurs de ce traité, on trouve l'Autriche, le Brésil, le Mexique, l'Afrique du Sud, la Suède, l'Irlande et la Nouvelle-Zélande. Mais les pays dans le monde détenteurs de la bombe atomique ont boycotté l'adoption du traité, ainsi que des pays membres de l'OTAN, plusieurs pays d'Afrique et d'Asie centrale, l'Australie et le Japon.

    « Aucun pays ne peut se targuer d'être à l'abri d'une éventuelle attaque atomique », a pour sa part déclaré Miroslav Lajčák, Président de l'Assemblée générale. « Hélas, les essais nucléaires, unanimement condamnés par le Conseil de sécurité, continuent aujourd'hui ».

    Les tensions entre la Corée du Nord, ses voisins et les Etats-Unis au sujet du programme nucléaire nord-coréen sont une source d'inquiétude pour la communauté internationale. Le Président américain Donald Trump a menacé mardi de « totalement détruire » la Corée du Nord. Le Secrétaire général de l'ONU António Guterres a rappelé que « des paroles incendiaires pouvaient mener à des malentendus fatals ».

     

    Lors d'une autre réunion consacrée au TICE, le Secrétaire général a encouragé les huit Etats dont la ratification est déterminante pour qu'il entre vigueur à le faire « le plus tôt possible ».

     

    Il a aussi sévèrement critiqué l'essai nucléaire effectué par la RDPC en début de mois. « De manière triste et dangereuse, les actions provocatrices et déstabilisantes de la RDPC » mettent à mal la « culture mondiale d'opposition aux essais nucléaires » obtenue ces vingt dernières années, a dit le chef de l'ONU.

    Etats-Unis, France et Royaume-Uni, membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, ont à plusieurs reprises critiqué l'initiative ces derniers mois. Ils ont cité la crise nord-coréenne en exemple d'un contexte sécuritaire qui rendrait l'arme atomique indispensable.

    «Il n'y a rien que je souhaite tant pour ma famille qu'un monde sans arme nucléaire, mais nous devons être réalistes. (...) Qui peut croire que la Corée du Nord accepterait une interdiction des armes nucléaires? », avait ainsi déclaré en mars l'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley.

    La Suisse ne fait pas partie des Etats qui signent ce texte mercredi. La Confédération aura besoin de plusieurs mois avant de décider quelle est sa position sur le nouveau Traité d'interdiction des armes nucléaires, a-t-elle fait savoir il y a une semaine.  


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    Adoption d'un Traité « historique » sur l'interdiction des armes nucléaires

    7 juillet 2017 – Les Etats participants à la Conférence pour la négociation d'un instrument juridiquement contraignant visant à interdire les armes nucléaires ont adopté le 7 juillet 2017 à New York un Traité rendant illégales les armes nucléaires.

    les Etats participants à la Conférence ont approuvé le Traité, par 122 voix pour, une contre (Pays-Bas) et une abstention (Singapour).

    « Nous allons quitter cette salle aujourd'hui avec la satisfaction du devoir accompli, (…) forts du désir des peuples du monde entier de forger un monde sans armes nucléaires », a déclaré la Présidente de la Conférence, Elayne Whyte Gómez, du Costa-Rica. « C'est un message historique pour l'humanité », a-t-elle ajouté.

    « Nous sommes sur le point de dire aux 'Hibakusha' qu'après tant de décennies, nous avons enfin jeté les bases d'un monde sans armes nucléaires », a poursuivi la Présidente, en présence de deux survivants d'Hiroshima venus assister, visiblement émus, à l'adoption du texte, Setsuko Thurlow, Ambassadrice de la paix d'Hiroshima, et Toshiki Fujimori, Secrétaire général adjoint de la Confédération japonaise de l'organisation des victimes des bombes A et H (Hidankyo).

    « Nous sommes sur le point de dire à nos enfants que, oui, il est possible d'hériter d'un monde exempt d'armes nucléaires pour les générations futures », a insisté Mme Whyte Gómez, avant de saluer les négociateurs du texte pour avoir travaillé « sans relâche » à l'élaboration du texte.

    Point d'orge de la Conférence, cette adoption est en effet venue ponctuer plus de trois semaines de négociations acharnées entre Etats membres, marquées par les apports significatifs des représentants de la société civile et la présence médiatisée de plusieurs survivants d'Hiroshima et de Nagasaki – les « Hibakusha », dont le Traité reconnait les souffrances. Au fil des négociations, entamées le 15 juin dernier, ce qui était un projet de convention est devenu un « projet de traité sur l'interdiction des armes nucléaires », composé d'un préambule de 24 alinéas et de 20 articles.

    Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, s'est félicité de l'adoption du Traité sur l'interdiction des armes nucléaires, rappelant qu'il s'agit du premier instrument multilatéral juridiquement contraignant pour le désarmement nucléaire qui ait été négocié en 20 ans.

    « Le Secrétaire général espère que ce nouveau traité favorisera un dialogue inclusif et une coopération internationale renouvelée visant à atteindre l'objectif déjà attendu du désarmement nucléaire », a dit son porte-parole dans une déclaration à la presse.

    Il faut cependant être prudent. Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni) ainsi que les puissances nucléaires indienne, pakistanaise, nord-coréenne et israélienne ont boycotté les négociations de New York qui faisaient suite à une résolution de l’Assemblée générale adoptée l’an dernier. S’agit-il d’une mesure purement symbolique? Le traité, négocié sous l’impulsion de l’Autriche, du Brésil, du Mexique, de l’Afrique du Sud et de la Nouvelle-Zélande n’en émet pas moins un message fort dans un contexte d’instabilité géopolitique. Il pourrait toutefois avoir peu d’effets concrets.

    Les Pays-Bas, seul pays parmi les 29 membres de l’OTAN à avoir suivi les discussions, s’étaient abstenus lors de l’adoption de la résolution préparatoire en décembre 2016, se plaçant dans une position difficile au sein de l’Alliance atlantique. Le pays héberge en effet des armes nucléaires américaines. Il a voté contre le traité vendredi. Le Japon, seul pays victime de frappes nucléaires, n’a pas non plus participé aux négociations.

    Le Comité international de la Croix-Rouge, qui a participé aux discussions à New York, se félicite de ce premier pas dans la bonne direction par la voix de son président Peter Maurer: «Aujourd’hui, le monde a franchi une étape historique en vue de rendre illicites ces armes inhumaines qui frappent sans discrimination – un point de départ crucial vers leur élimination future. Cet accord constitue une victoire importante pour l’humanité tout entière. Le CICR est convaincu que le nouveau traité constitue une base solide pour lutter contre la prolifération des armes nucléaires et ouvre la voie à leur élimination.»

    La Suisse et l’Allemagne inquiètes

    La Suisse s’était abstenue lors du vote en 2016 sur la résolution. Elle a toutefois participé aux négociations. Au même titre d’ailleurs que l’Allemagne, elle a longtemps estimé que ce n’était pas le bon chemin à prendre, qu’il fallait avancer pas à pas avec les puissances nucléaires. Vendredi, elle a cependant voté pour le traité d’interdiction, estimant que l’objectif de vouloir combler une lacune juridique (les armes nucléaires ne sont pas interdites en droit international contrairement aux armes chimiques et biologiques) était pertinent, notamment au vu des valeurs humanitaires défendues par la Confédération. Mais elle demeure sceptique quant au résultat.

    « L'impulsion pour le traité reflète les inquiétudes croissantes concernant le risque posé par la continuation de l'existence d'armes nucléaires ainsi que la prise de conscience des conséquences humanitaires catastrophiques qui résulteraient si les armes nucléaires étaient toujours utilisées », a ajouté le porte-parole . « Le traité représente une étape importante et une contribution à l'aspiration commune d'un monde sans armes nucléaires ».

    Pour lire le texte, cliquez ici.

    Adoption d'un Traité « historique » sur l'interdiction des armes nucléaires


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  • Crise mondiale de la torture!»

    Trente ans jour pour jour après l’entrée en vigueur du traité bannissant les traitements inhumains, les cas se multiplient.

    «Nous assistons à une crise mondiale liée à la torture. Ces cinq dernières années, Amnesty International a signalé des cas dans 141 pays, c’est-à-dire les trois quarts du monde!» Sur son site Internet, l’ONG de défense des droits de l’homme n’hésite pas à tirer un bilan des plus sombres en cette Journée internationale pour les victimes de la torture.

    Pourtant, le 26 juin 1987, il y a trente ans jour pour jour, entrait en vigueur ladite «Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants», qui a été ratifiée depuis lors par quelque 160 pays.

    Manifestement, les textes de loi ne suffisent pas. Et la bataille n’est jamais définitivement gagnée. Dans bien des pays, la pratique de la torture a été réintroduite ou est revenue en force dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

    Alors que faire? Le Zurichois Nils Melzer, rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, a rappelé ce lundi que les risques de torture sont considérablement plus élevés pendant les premières heures d’interrogatoire. Il est donc crucial d’obtenir qu’un accès à un avocat soit garanti et que la détention soit annoncée aux proches du suspect.

    Et n'allons surtout pas croire que la Suisse est sans reproche! Le rapporteur spécial a récemment critiqué notre pays en avril dans le cadre du dossier d'extradition de la militante basque Nekane Txapartegi vers l'Espagne, où elle avait été condamnée après des aveux obtenus sous la torture. De même, La Cour européenne des droits de l'homme a condamné la Suisse en janvier pour avoir renvoyé un réfugié tamoul, qui a été torturé à son retour au Sri Lanka.

    Nils Melzer refuse de baisser les bras. Avec d’autres spécialistes de l’ONU, il a lancé vendredi un appel pour l’interdiction absolue de la torture, qui «pourrait bien constituer l’avancée la plus fondamentale dans l’histoire de l’humanité».


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  • Le Protocole de l'OIT sur le travail forcé entre en vigueur

    Quelle que soit sa forme, servitude, traite ou esclavage, le travail forcé touche souvent les plus vulnérables: femmes et enfants contraints à la prostitution, migrants pris au piège de la servitude pour dette, ouvriers clandestins, tous retenus par des moyens illégaux.

    • Près de 21 millions de personnes sont victimes du travail forcé – 11,4 millions de femmes et de filles et 9,5 millions d’hommes et de garçons.
    • Près de 19 millions d’entre elles sont exploitées par des particuliers ou des entreprises privées et plus de 2 millions par un Etat ou des groupes rebelles.
    • Parmi celles qui sont exploitées par des particuliers ou des entreprises, 4,5 millions subissent une exploitation sexuelle forcée.
    • Dans l’économie privée, le travail forcé génère 150 milliards de dollars de profits illégaux par an.
    • Le travail domestique, l’agriculture, la construction, la production manufacturée et le spectacle figurent parmi les secteurs les plus concernés.
    • Les travailleurs migrants et les populations indigènes sont particulièrement vulnérables au travail forcé.

     

    Le Protocole sur le travail forcé de l'Organisation internationale du travail (OIT), qui a été adopté par la Conférence internationale du Travail en 2014, entre en vigueur le 9 novembre, un an après avoir obtenu sa deuxième ratification.

    Tous les pays qui l'ont ratifié – Niger, Norvège, Royaume-Uni, Mauritanie, Mali, France, République tchèque, Panama et Argentine – doivent désormais remplir leurs obligations définies par le Protocole.

    « Le Protocole de l'OIT sur le travail forcé est entré en vigueur. Il impose aux pays de prendre des mesures efficaces pour prévenir et éliminer le travail forcé, et pour protéger les victimes et leur donner accès à la justice», a rappelé le Directeur général de l'OIT, Guy Ryder, dans une déclaration conjointe avec les dirigeantes de l'Organisation internationale des employeurs (OIE) et de la Confédération syndicale internationale (CSI).

    Vingt-et-un millions de personnes dans le monde sont victimes du travail forcé. Ce sont les plus vulnérables de nos sociétés – des ouvriers agricoles, des migrants, des travailleurs domestiques, des marins, des femmes et des filles obligées de se prostituer et d'autres qui sont aussi victimes de pratiques abusives, exploités et peu voire pas rémunérés. L'OIT estime que le travail forcé génère 150 milliards de profits illégaux par an.

    Le jour même où le Protocole entre en vigueur, l'Argentine a fait part de sa détermination à mettre fin à l'esclavage moderne en devenant le 9e pays à ratifier le Protocole sur le travail forcé. En novembre 2017, l'Argentine s'apprête aussi à accueillir la prochaine Conférence mondiale sur le travail des enfants et le travail forcé à Buenos Aires.

    L'OIT, en partenariat avec la CSI et l'OIE, anime la campagne 50 for Freedom dans le but de sensibiliser l'opinion à cette question et de convaincre au moins 50 Etats de ratifier le Protocole d'ici à 2018.

    Des milliers de personnes dans le monde entier ont apporté leur soutien à la campagne, aux côtés de plusieurs personnalités comme le lauréat du Prix Nobel de la paix, Kailash Satyarthi, et Urmila Bhoola, Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les formes contemporaines d'esclavage, ainsi que plusieurs organisations nationales et internationales.

    Plusieurs artistes ont aussi mis leur talent au service de '50 for Freedom': la photographe humanitaire Lisa Kristine a fait don des photos de victimes du travail forcé qui figurent sur le site web de 50 for Freedom. Les acteurs Wagner Moura, David Oyelowo, Robin Wright, Lindiwe Bungane et Joaquin Furriel ont enregistré des vidéos dans lesquelles ils racontent l'histoire vraie d'hommes et de femmes enrôlés dans l'esclavage moderne.


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  • Entrée en vigueur du Traité sur le commerce des armes

    23 décembre 2014 – L'entrée en vigueur imminente du Traité sur le commerce des armes (TCA) est une étape historique dans la lutte contre les violations à l'encontre des droits de l'homme liées au déficit de régulation en matière de commerce international des armes classiques, a salué mardi le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein.

    « Le TCA fournit un cadre des droits de l'homme aux États, afin qu'ils puissent évaluer les exportations d'armes classiques, de munitions et de pièces détachées, de façon à mettre un terme à la circulation d'armes pouvant être utilisées pour commettre des atrocités et autres violations graves des droits de l'homme », a déclaré le Haut-Commissaire dans un communiqué de presse à Genève.

    Le TCA, qui est le premier traité réglementant le commerce international des armes classiques, entrera en vigueur le 24 décembre, après avoir été ratifié par le 50ième État dont la signature était requise en septembre dernier. Le Traité sur le commerce des armes a été adopté le 2 avril 2013 par l'Assemblée générale des Nations Unies (A/67/234B) à une majorité de 154 voix pour et 3 contre. Son entrée en vigueur est prévue 90 jours après que le 50ième pays l'ait ratifié, ce qui s'est produit le 25 septembre 2014. A ce jour, 60 États ont ratifié le TCA, et 130 l'ont signé avec l'intention de ratifier le traité.

    « Les États qui ont ratifié le TCA doivent désormais évaluer les conséquences de tout transfert d'armes pour les droits de l'homme et le droit international humanitaire », s'est félicité M. Zeid.

    « Les réglementations laxistes encadrant le commerce des armes classiques, et l'accès généralisé et l'utilisation abusive des armes qui en découlent ont engendré un coût humain énorme », a ajouté le chef des droits de l'homme de l'ONU, précisant que le commerce non réglementé des armes est l'un des principaux moteurs de conflits armés et de la violence, contribuant aux violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire.

    « L'un des principaux objectifs du traité est de réduire la souffrance humaine en établissant les normes internationales communes les plus strictes pour réguler ou améliorer le commerce international des armes classiques», a-t-il ajouté.

    Le Haut-Commissaire a appelé tous les États n'ayant pas encore ratifié le TCA à le faire dans les plus brefs délais et à appliquer les dispositions du traité à un éventail d'armes classiques le plus large possible.

    « Le TCA est un outil conféré aux États pour prévenir la violence et l'insécurité résultant de la circulation des armes, et ce faisant, pour s'acquitter de leurs obligations en matière de droits de l'homme », a déclaré Zeid.

    Les États parties au TCA ne sont pas censés autoriser l'exportation d'armes classiques s'ils ont connaissance que ces armes pourraient être utilisées dans le cadre d'un génocide, de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre. « En outre, s'il existe un risque majeur que les armes exportées puissent être utilisées pour commettre ou faciliter une violation grave des droits de l'homme ou du droit international humanitaire, de tels transferts doivent être interrompus », a précisé le Haut-Commissaire.

    « Je me réjouis de la multitude d'initiatives et d'activités déjà entreprises par différentes entités pour aider à la mise en œuvre du TCA », s'est félicité quant à lui le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, à l'occasion d'une déclaration de presse prononcée mardi par son porte-parole.

    « L'Organisation des Nations Unies continuera de travailler en partenariat avec les États, les organisations régionales et la société civile pour s'assurer que tous les États parties auront la capacité de se conformer pleinement aux dispositions du traité », a déclaré en conclusion le chef de l'ONU.


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  • Les États-Unis progressent vers l’interdiction des mines antipersonnel

    Washington a affiché sa volonté de ratifier la Convention d’Ottawa interdisant la fabrication, le stockage, le transfert et l’utilisation des mines antipersonnel.

    Enfin ! Après des années de refus, les États-Unis, premier grand fabricant d’armes au monde, se sont enfin décidés à faire un pas vers le traité interdisant les mines antipersonnel. Vendredi 27 juin, ils ont non seulement annoncé qu’ils ne produiraient plus ni ne chercheraient à acquérir de mines antipersonnel, mais surtout qu’ils avaient, à terme, l’intention d’adhérer à la convention d’Ottawa.

    Signé en 1997, ce texte impose à ses adhérents l’interdiction de produire, de stocker, de transférer et d’utiliser des mines antipersonnel. Jusqu’à présent, Washington s’est toujours refusé à le ratifier, arguant de l’utilité de ces armes pour la défense du pays et de ses alliés.

    À la recherche de « solutions » conformes à la convention d’Ottawa

    Si Washington avait déjà fait part il y a cinq ans de son intention de réexaminer sa position, cette décision a surpris lorsqu’elle a été annoncée dans la capitale mozambicaine Maputo, lors d’une conférence de suivi de l’application de la convention d’Ottawa.

    Maputo est un lieu symbolique puisque deux millions de mines antipersonnel étaient disséminées dans ce pays en 1992, à la fin d’une guerre civile longue de seize années. Certaines zones restent aujourd’hui très dangereuses.

    « Notre délégation à Maputo a dit clairement que nous cherchions assidûment des solutions conformes à la convention d’Ottawa qui, à terme, permettraient aux États-Unis d’y adhérer », a annoncé la Maison-Blanche dans un communiqué. Les États-Unis ne « produiront pas à l’avenir, ni ne chercheront à acquérir de mines antipersonnel, y compris à remplacer les stocks existants », précise la présidence américaine.

    Washington actait déjà en faveur du désarmement

    Le pays effectue « des simulations et modélisations » pour déterminer les moyens de protéger ses intérêts en se passant des mines, détaille la porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Caitlin Hayden.

    Le pays ne produit déjà plus de mines, mais il dispose d’un stock évalué à plus de trois millions de mines. Il commencera à se détériorer d’ici dix ans et sera « totalement inutilisable » dans 20 ans, selon le porte-parole du Pentagone, le contre-amiral John Kirby. La dernière fois que les États-Unis ont utilisé ces armes remonte à la guerre du Golfe, en 1991.

    « Mauvaise » décision et « bons sentiments »

    Dès son annonce, la décision a provoqué des critiques. Le président de la commission des Forces armées de la Chambre des représentants, le républicain Buck McKeon, l’a vertement critiquée, arguant qu’il s’agissait de « bons sentiments » et d’une « mauvaise » décision pour la sécurité du pays.

    « C’est vraiment une solution onéreuse à la recherche d’un problème qui n’existe pas », a-t-il ajouté, rappelant que les militaires américains considéraient les mines antipersonnel comme un « outil important de l’arsenal des États-Unis ».

    Les chefs du Pentagone « soutiennent totalement » cette nouvelle approche, a répliqué le contre-amiral Kirby.

    « Débarrasser le monde de ces armes mortelles »

    L’annonce américaine a en revanche ravi l’organisation Human Rights Watch (HRW), l’une des ONG membres de la campagne internationale pour l’interdiction des mines antipersonnel qui avait reçu le prix Nobel de la paix en 1997.

    « Il s’agit d’une reconnaissance importante que le traité (d’Ottawa) fournit le meilleur cadre pour débarrasser le monde de ces armes mortelles », affirme Steve Goose, un responsable de HRW.

    À ce stade, seuls 35 pays n’ont pas signé la convention d’Ottawa. Les États-Unis sont le seul pays de l’Otan dans ce cas, aux côtés de deux membres du Conseil de sécurité de l’ONU – la Chine et la Russie – de l’Inde, du Pakistan, d’Israël ou encore des deux Corées.

    Depuis l’entrée en vigueur de la convention en mars 1999, le nombre de victimes (morts ou blessés) des mines antipersonnel a été divisé par cinq, selon l’ONG Handicap International. Soixante-dix millions de mines ont été détruites par les 161 États qui ont ratifié le traité.

    La porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche, Caitlin Hayden, rappelle que les États-Unis ont versé 2,3 milliards de dollars (1,7 milliard d’euros) d’aide depuis 1993 à plus de 90 pays pour des programmes de destruction d’armes conventionnelles, dont font partie les mines antipersonnel.


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  • Les Etats-Unis ont signé mercredi 25 septembre 2013 le premier traité international régulant le commerce des armes conventionnelles, pour tenter de juguler l'afflux d'armes utilisées pour perpétrer des crimes de guerre et de génocide, a dit à l'AFP une source proche du dossier.

    A l'ONU, le secrétaire d'Etat John Kerry a parapher ce document, auquel Washington a longtemps été opposé, mais qui a été adopté en avril par les Nations unies afin de réguler des échanges internationaux d'une valeur de 80 milliards de dollars par an, selon cette source.

    A l'époque, M. Kerry avait salué ce premier traité sur le commerce international des armes conventionnelles, se félicitant que ce texte n'empiète pas sur la Constitution américaine qui garantit le droit de posséder une arme.

    Il avait souligné que ce traité, qui doit être encore ratifié par le Congrès, allait "contribuer à réduire le risque que les transferts internationaux d'armes conventionnelles servent à perpétrer les pires crimes de la planète, notamment de terrorisme, de génocide, les crimes contre l'humanité ou les crimes de guerre".

    Mais "rien dans ce traité ne peut enfreindre les droits des citoyens américains définis par notre législation ou par notre Constitution, y compris par le Second amendement", qui garantit à tout Américain le droit de posséder une arme, avait rappelé le secrétaire d'Etat.

    De fait, les Etats-Unis, principaux pourvoyeurs d'armes de la planète avec 30% du marché, ont obtenu que les munitions soient traitées à part, avec des contrôles moins complets.

    En discussion depuis sept ans, ce traité est le premier texte international majeur sur le désarmement depuis le traité sur l'interdiction des essais nucléaires de 1996.

    Mais le tout puissant lobby des armes à feu aux Etats-Unis, la NRA, redoute que cette convention internationale ne limite les droits des Américains à porter une arme, en plein débat dans le pays après une succession de fusillades meurtrières, dont la dernière le 16 septembre dans une base navale de Washington.

     


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  • Armes chimiques: l'ONU a reçu la demande d'adhésion de Damas à la convention


    NEW YORK - L'ONU a annoncé le 12 septembre avoir reçu la demande d'adhésion de la Syrie à la convention de 1993 sur l'interdiction des armes chimiques.

    Nous avons reçu un document d'adhésion de la part du gouvernement syrien concernant la convention sur les armes chimiques et nous l'étudions, il est en cours de traduction, a déclaré un porte-parole de l'ONU, Farhan Haq.

    Il précisé que l'adhésion à un traité déjà signé par d'autres pays requiert certaines procédures qui prendront quelques jours. Il faut un délai de quelques jours avant qu'un pays puisse se joindre formellement à une convention, a-t-il précisé. L'adhésion est une première étape, a-t-il ajouté.

    Dans un entretien avec un média russe, le président syrien Bachar al-Assad avait indiqué que la Syrie allait envoyer un message à l'ONU et à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques, dans lequel figureront les documents techniques nécessaires pour signer l'accord.

    La Convention sur l'interdiction des armes chimiques (CIAC), signée le 13 janvier 1993 à Paris et entrée en vigueur le 29 avril 1997, interdit la fabrication, le stockage et l'utilisation d'armes chimiques et interdit aux signataires d'aider un pays tiers à s'engager dans la fabrication ou l'utilisation de ces armements. Son application, notamment la destruction des stocks, est supervisée par l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), basée à La Haye (Pays-Bas)

    Selon les procédures appliquée par l'ONU pour les traités, l'adhésion a le même effet juridique que la ratification et se produit en général quand le traité est déjà entré en vigueur. La Syrie n'a jamais signé la Convention de 1993 mais a signé le Protocole de Genève de 1925 qui interdit l'utilisation d'armes chimiques.

     


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  • Le traité international sur les droits des employés de maison est entré en vigueur jeudi 5 septembre. Ces « invisibles » sont plus de 50 millions dans le monde, dont près d’un tiers sans aucune protection légale. Seuls huit pays ont ratifié ce texte historique.

    Vers une meilleure protection des travailleurs domestiques

    On les appelle les « invisibles ». Ils jardinent, bricolent, conduisent la voiture du patron. Elles font la cuisine, nettoient la maison, gardent les enfants, s’occupent des personnes âgées. Ces employés de maison travaillent derrière les portes closes des domiciles privés, soustraits à la vue et à l’attention du public, souvent hors d’atteinte des syndicats et des organisations de défense des salariés. Fréquemment mal payés, parfois victimes de mauvais traitements voire d’abus sexuels, ils ne comptent pas leurs heures.

    Un texte ratifié par 8 pays

    Pour la première fois, les « invisibles » disposent d’un texte international pour défendre leurs droits. La convention sur le « travail décent pour les travailleuses et les travailleurs domestiques » entre en vigueur jeudi 5 septembre. Adopté en 2011 par les représentants des gouvernements, des employeurs et des salariés des 184 États membres de l’Organisation internationale du travail (OIT), le traité propose des normes pour encadrer le secteur.

    En le ratifiant au cours des douze derniers mois, huit pays ont permis sa mise en œuvre : l’Uruguay, l’Afrique du Sud, la Bolivie, l’île Maurice, l’Italie, le Nicaragua, le Paraguay et les Philippines. Si d’autres États suivent leur exemple, la convention pourrait améliorer le sort de millions de personnes.

    En augmentation régulière depuis quinze ans, le nombre de travailleurs domestiques dépasse en effet les 52 millions selon les statistiques officielles de 117 pays. L’Asie-Pacifique (21,5 millions) concentre près de la moitié de ces emplois, suivi par l’Amérique latine (19,6 millions), l’Afrique (5,2 millions), les pays développés (3,6 millions) et le Moyen-Orient (2,1 millions). Pour l’OIT, « il s’agit là d’estimations prudentes qui sous-évaluent probablement l’ampleur du phénomène ».

    83% de femmes

    Ces travailleurs sont des travailleuses dans 83 % des cas. Elles représentent 7,5 % de l’emploi salarié féminin dans le monde, une proportion qui grimpe à 20 % au Moyen-Orient et 15 % en Amérique latine. « Le secteur compte les employés les plus maltraités et exploités du monde », affirme Gauri Van Gulik, spécialiste de la question pour l’ONG Human Rights Watch. 

    Près de 30 % des membres de la profession n’ont aucune protection légale et 45 % n’ont droit à aucun jour de congé. « Dans tous les domaines, on constate de fortes disparités entre les travailleurs domestiques et les autres », précise l’OIT. Les migrants sont les plus exposés à l’esclavage moderne : confinement au domicile, brimades, confiscation de passeports, salaires impayés, travail sans repos… « Beaucoup vivent dans des pays dont ils ignorent la langue et sont isolés au sein du domicile de particuliers, souligne Gauri Van Gulik. La convention internationale qui entre en vigueur peut changer des vies en aidant ces personnes à faire leur travail en toute sécurité et à obtenir de l’aide quand elles sont victimes d’abus. »

    Des avancées concrètes

    Dans le détail, le texte offre de nombreuses avancées concrètes. Il prévoit des horaires de travail raisonnables, un salaire minimum, le paiement des heures supplémentaires, un repos hebdomadaire d’au moins 24 heures consécutives, une couverture médicale et de maternité, le respect des droits fondamentaux au travail, y compris la liberté d’association et le droit à la négociation collective. La convention encadre aussi le recours aux migrants qui devront recevoir leur contrat écrit « avant le passage des frontières nationales ».

    L’entrée en vigueur du traité n’implique pas que tous les États membres de l’OIT s’y soumettront automatiquement. Il ne sera pas contraignant pour ceux qui ne le ratifieront pas, ce qui risque d’en limiter sa portée. La France quant à elle a manifesté sa volonté de signer le texte. « La convention est une belle avancée, se félicite Geneviève Colas, spécialiste de la traite des êtres humains au Secours catholique. Elle va obliger les pays à prendre conscience de ce phénomène caché, à modifier les mentalités, à réfléchir à leur législation. Même en France, je rencontre des policiers qui considèrent les travailleurs domestiques comme des jeunes filles au pair. »

    Le Brésil sur la bonne voie

    Depuis l’adoption du traité en 2011, une trentaine de pays ont voté des réformes visant à mieux protéger la profession. « L’extension du repos hebdomadaire aux travailleurs domestiques migrants adoptée dernièrement à Singapour pourrait être une indication de futures initiatives dans la région », espère l’OIT.

    L’Amérique latine est sur la bonne voie. Champion du monde du travail domestique avec 6,1 millions d’employées, le Brésil a mis fin à une injustice aussi ancienne que la colonisation. En avril dernier, le Congrès a modifié la Constitution pour permettre aux employés de maison de bénéficier des mêmes règles du droit du travail que les autres. Un syndicat a parlé « de seconde abolition de l’esclavage ».

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    15,5 millions d’enfants « domestiques »

    Les enfants employés comme domestiques seraient au nombre de 15,5 millions, sur les 305 millions d’enfants qui travaillent dans le monde, selon une étude de l’Organisation internationale du travail (OIT) publiée en juin.

    Leur fonction les oblige à vivre séparée de leur famille, à la merci de leurs employeurs, un isolement qui les rend vulnérables aux violences physiques, psychiques et sexuelles.

    Ce fléau est particulièrement étendu en Afrique, mais l’Asie et le Moyen-Orient sont aussi très concernés. Au Pakistan et au Népal, il arrive que des familles rurales endettées louent leurs enfants comme domestiques pour rembourser leurs prêts.

     CK


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