• De Beslan à In Amenas, comment répondre à une prise d'otages massive

    Comment répondre à une prise d'otages massive? Depuis une dizaine d'années, les Européens tentent de bâtir une doctrine face au casse-tête des actions du type de Beslan ou de Bombay hier, d'In Amenas aujourd'hui.

     

    "Dans ce genre de situation, tu multiplies l'aléatoire par le nombre de terroristes et d'otages", résume un spécialiste de ces opérations.

     

    Malgré la prise d'otages de onze Israéliens aux Jeux de Munich en 1972, ou encore la vague des détournements d'avions, le concept de "prise d'otages de masse" (POM) est récent.

     

    Celle du théâtre de la Doubrovka à Moscou en 2002, qui s'est soldée par 130 morts sur les 800 personnes retenues par un commando tchétchène, "a été l'élément déclencheur d'une prise de conscience en Europe", explique Frédéric Gallois, l'ancien patron du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) qui intervient en France dans ce genre de situation.

     

    Ont suivi en 2004 l'assaut des forces russes sur l'école de Beslan en Ossétie du Nord, où un commando réclamant la fin de la guerre en Tchétchénie détenait plus de 1.000 personnes (331 morts), puis les attaques islamistes de Bombay en 2008 (quelque 170 morts), notamment contre des hôtels, qui serviront de modèle à des exercices en France.

     

    C'est notamment pour répondre à ce défi que le GIGN a entamé sa mue en 2007, ses forces passant de 150 à 400 hommes, se souvient Frédéric Gallois. D'autres se sont adaptés, comme les policiers du Raid en France, le GSG-9 allemand (créé après le fiasco de Munich en 1972), les SAS britanniques, les Navy Seals ou les Delta Force américains... Les Européens échangent leur expertise au sein du réseau "Atlas".

     

    Trois manettes

     

    Dans ce type de crise, selon Frédéric Gallois, les autorités disposent de "trois manettes" à "actionner simultanément": le renseignement, la négociation, la force.

     

    Le renseignement est crucial pour évaluer l'adversaire, avec du matériel optique, des écoutes: quel armement, présence ou non d'explosifs, positionnement des otages et des ravisseurs... La cellule de crise se renseigne aussi sur les preneurs d'otages, leur passé, afin notamment d'évaluer leur "détermination suicidaire".

     

    Si celle-ci est forte, note un spécialiste, la confrontation sera inévitable et la négociation ne visera qu'à gagner du temps. Mais elle n'en reste pas moins nécessaire, relève un spécialiste convaincu que les Algériens y ont recours même s'ils affirment l'inverse.

     

    Outre la connaissance des exigences des preneurs d'otages, ces discussions répondent à deux objectifs: "gagner du temps, glaner du renseignement" pour "évaluer le temps disponible avant un passage à l'acte", explique Frédéric Gallois.

     

    Dernière "manette", l'assaut. Deux plans devront être prêts. Le premier sera déclenché en urgence en cas d'information alarmante, le second est destiné à "un assaut délibéré" dont l'autorité "prend l'initiative".

     

    En Algérie, les forces d'intervention ont "une bonne expertise, du bon matériel", "un vrai savoir-faire", "sont bien entraînées", selon Eric Denécé, directeur du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R). Mais généralement, "ils ont résolu ce genre de situation par l'assaut", poursuit-il.

     

    Quand une opération est-elle réussie? Les Russes avaient été critiqués pour la brutalité de leur gestion des opérations Doubrovka et Beslan.

     

    Un membre d'unité spécialisée se montre moins affirmatif: "Si on est face à des gens qui ont décidé de mourir, si tout est piégé comme c'était le cas à Beslan, il faut partir du principe que potentiellement tout Le Monde peut mourir".

     

    Dans le théâtre de la Doubrovka, 130 personnes ont perdu la vie. "Mais on peut aussi se dire que plus de 600 vies ont été sauvées, et que c'est extraordinaire", conclut Frédéric Gallois.


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