• Destruction et droit de l'environnement en Ukraine

    La destruction de l’environnement en période de conflit armé ne date pas d’hier, mais son ampleur est sans commune mesure avec l’histoire moderne.

    La prise de conscience d’une telle destruction émerge avec la guerre du Vietnam, au cours de laquelle l’aviation étasunienne déverse sur les forêts vietnamiennes des millions de litres d’herbicide – le tristement célèbre Agent orange – afin de mettre l’ennemi à découvert.

    Aujourd’hui, au drame humanitaire qui se déroule en Ukraine s’ajoute un risque de catastrophe environnementale. C’est un enjeu essentiel, pendant le conflit évidemment, mais également une fois celui-ci achevé, tant les effets néfastes des combats sur l’environnement sont durables, si ce n’est irréversibles. Or le retour à la paix et la reconstruction s’avèrent compromis dans un environnement pollué et profondément dégradé.

    Le droit international n’ignore pas les dommages environnementaux provoqués par les conflits armés. Pour autant, la guerre en Ukraine vient rappeler que la réglementation de la conduite des hostilités demeure lacunaire pour assurer une protection effective de l’environnement.

    Quels sont les risques environnementaux en Ukraine ?

    Le risque nucléaire est celui qui suscite le plus de craintes. Fortement nucléarisée, l’Ukraine comprend pas moins de 15 réacteurs sur son territoire.

    Outre l’occupation temporaire de Tchernobyl par la Russie, des dépôts de déchets radioactifs ont été la cible de missiles. Surtout, le 3 mars 2022, un incendie s’est déclaré dans la plus grande centrale nucléaire d’Europe, celle de Zaporijia.

    Plus généralement, l’Ukraine héberge un grand nombre de sites industriels dangereux pour l’environnement (raffineries, pipelines…). Le lendemain de l’invasion russe, l’Observatoire des conflits et de l’environnement (une ONG britannique) dressait un premier bilan des dégâts. Depuis, la liste de sites industriels détruits et sources de pollution ne cesse de s’allonger.

    Les bombardements et incendies de sites industriels ont ainsi généré une forte pollution atmosphérique, composée de gaz toxiques et de métaux lourds.

    L’Ukraine est également un pays riche en biodiversité. Le territoire ukrainien abrite cinquante zones humides d’importance internationale recensées au titre de la Convention Ramsar, ainsi que de nombreuses réserves naturelles et espèces protégées. Les incendies de forêts, les prélèvements de ressources naturelles ainsi que le braconnage sont autant de menaces qui pèsent sur la faune et la flore ukrainiennes.

    Que peut le droit international humanitaire ?

    Suite à la guerre du Vietnam, des instruments du droit international humanitaire (DIH) cherchant à protéger l’environnement ont vu le jour.

    La Convention ENMOD, adoptée en 1976 et ratifiée par la Russie et l’Ukraine, est le premier traité international à envisager directement la question environnementale dans un contexte de guerre.

    Elle interdit aux États d’utiliser à des fins militaires des techniques de modification de l’environnement ayant des effets étendus, durables ou graves, en tant que moyens de causer des destructions à tout autre État partie. Autrement dit, elle vise à proscrire l’utilisation de l’environnement en tant qu’arme de guerre, c’est-à-dire des techniques ayant pour objet de modifier, par la manipulation de processus naturels, la structure de la Terre (tsunamis, tremblements de terre…).

    Seulement, les conditions d’application de ce traité sont incertaines. Vise-t-il toutes les techniques de modification environnementale, indépendamment de leur degré de raffinement technologique ? Par exemple, des controverses existent aux fins de savoir si la destruction de barrages ou encore la politique de la terre brûlée sont ou non interdites par la Convention.

    En outre, la définition des « effets étendus, durables ou graves » est particulièrement obscure, subjective et circonstanciée.

    Et, surtout, la mise en œuvre de la responsabilité d’un État contrevenant au traité revient au Conseil de sécurité des Nations unies, si bien qu’elle se heurte, en l’espèce, au droit de veto russe.

    Le Protocole I de 1977 additionnel aux Conventions de Genève, ratifié par la Russie et l’Ukraine, vise, à la différence de la Convention ENMOD, à protéger l’environnement en tant que victime de guerre.

    Là encore, l’application de cette protection paraît hypothétique, en ce que seuls les moyens de guerre qui causent des dommages étendus, durables et graves à l’environnement sont prohibés. Ce faisant, les exigences requises pour déclencher l’application de cette protection sont excessivement élevées.

    Au demeurant, les auteurs du Protocole I ne sont jamais entendus pour définir ces trois critères. Dès lors, on ne sera guère étonné qu’aucune instance internationale n’ait, à ce jour, reconnu la violation de ces dispositions, y compris lorsque la question s’est posée devant le Comité du Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, suite aux bombardements par l’OTAN de la Serbie en 1999.

     

    D’autres normes du DIH, dont l’objet premier n’est pas l’environnement, pourraient aussi protéger ce dernier. En ce sens, l’interdiction de certaines armes en raison de leur dangerosité pour les civils peut bénéficier, par ricochet, à l’environnement.

    Ainsi en est-il de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel ou celle prohibant les armes à sous-munitions, armes dont l’utilisation par la Russie a fait l’objet de vives contestations.

    Mais pour que cette protection incidente de l’environnement soit effective, encore faudrait-il que la Russie ait ratifié ces conventions, ce qui n’est pas le cas. Dès lors, la Russie ne peut pas se voir opposer l’interdiction de telles armes sur le fondement de ces conventions.

    En somme, le DIH s’avère lacunaire pour protéger l’environnement en période de conflit armé.

    Le droit international pénal, souvent présenté comme le bras armé du DIH, est-il plus efficace pour protéger l’environnement ?

    Que peut la Cour pénale internationale ?

    Par une déclaration de 2015, l’Ukraine a accepté la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) pour connaître des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis sur son territoire depuis le 20 février 2014.

    À cet égard, le 28 février 2022, le Procureur de la CPI a pris la décision d’ouvrir une enquête sur la situation en Ukraine, estimant qu’il existe une base raisonnable de croire que de tels crimes y auraient été commis.

    S’agissant des crimes de guerre environnementaux, le Statut de Rome qui institue la CPI permet de poursuivre des individus ayant dirigé « intentionnellement une attaque en sachant qu’elle causera incidemment […] des dommages étendus, durables et graves à l’environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l’ensemble de l’avantage militaire concret et direct attendu ».

    Cependant, les conditions d’application entourant ce crime de guerre sont particulièrement restrictives.

    Premièrement, à l’instar du Protocole I, le Statut de Rome fixe un seuil élevé de dommage prohibé.

    Deuxièmement, un critère de proportionnalité s’ajoute, de sorte que les dommages étendus, durables et graves ne sont pas répressibles s’ils ne sont pas excessifs par rapport à l’avantage militaire attendu.

    Troisièmement, un critère d’intentionnalité est requis, c’est-à-dire qu’il faut prouver que l’accusé a eu l’intention de lancer une attaque et la connaissance des dommages que celle-ci cause à l’environnement.

    Il en résulte une protection pénale de l’environnement en pratique inapplicable. Pour l’heure, aucune sanction pénale n’a été prononcée par la CPI sur le fondement du crime de guerre environnemental.

    Indépendamment même du crime de guerre environnemental, le dommage environnemental pourrait, à tout le moins, servir de vecteur à la répression de crimes contre l’humanité, voire de génocide, dès lors qu’une destruction de l’environnement provoque volontairement une privation de ressources naturelles indispensables à la survie de la population civile ou d’un groupe national, ethnique, etc.

    Devant la CPI, l’affaire Procureur c. Omar Hassan Ahmad Al Bashir a été l’occasion de confirmer le lien potentiel entre l’environnement et le crime de génocide. En effet, la Chambre préliminaire de la CPI, en 2010, a estimé que la destruction, la pollution et l’empoisonnement des puits par les forces gouvernementales soudanaises s’inscrivaient dans une politique génocidaire menée contre les populations civiles dans la région du Darfour.

    Il est parfois proposé de réformer le Statut de Rome pour y introduire le crime d’écocide. Celui-ci présenterait notamment l’avantage d’être affranchi de l’exigence d’un dommage manifestement excessif par rapport à l’avantage militaire attendu, ou encore de s’appliquer aux personnes morales, telles que des organisations criminelles ou des multinationales.

    Cela étant, l’écocide n’est, pour l’heure, qu’un sujet de débat académique, tant les difficultés structurelles de la CPI (ressources limitées, absence de force de police, difficultés d’investigation et légitimité questionnée) empêchent actuellement une révision du Statut de Rome.

    En tout état de cause, l’introduction du crime d’écocide n’aurait pas d’incidence sur les poursuites liées à la guerre en Ukraine, puisque l’application d’un nouveau crime ne peut être rétroactive.

    Vers une convention internationale ?

    En définitive, le droit international s’avère impuissant à protéger l’environnement en période de guerre.

    Reste, pour ne pas finir sur une note trop sombre, le projet de la Commission du droit international qui a inscrit à son programme de travail le sujet de la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés. Un texte, ambitieux, a été provisoirement adopté.

    Celui-ci, outre un rappel du droit positif, est le support d’innovations intéressantes, telles qu’une application renforcée du droit international de l’environnement en période de conflit armé, ou encore la création de zones d’importance écologique, sur le modèle des zones démilitarisées, qui seraient protégées contre toute attaque aussi longtemps qu’aucun objectif militaire ne s’y trouve.

    L’adoption définitive de ce texte pourrait, on ne peut que le souhaiter, ouvrir la voie à l’élaboration d’une convention internationale sur le sujet.

     

     

     


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  • Victoire des écologistes: Shell interdit d’aller taper dans la Wild Coast

    La haute court de Cape Town a prononcé le 28 décembre 2021 l’interdiction pour le géant des hydrocarbures de mener une exploration sismique au large d’une réserve marine protégée.

    Une onde de choc toutes les dix secondes dans l’océan: un projet du géant Shell pour rechercher pétrole et gaz au large d’une des plus belles côtes d’Afrique du Sud, a été suspendu par la justice (High Court Judge Gerald Bloem), une victoire inédite pour les militants écologiques. 

    Ouverte sur l’océan Indien à l’est du pays, la «Wild Coast», aux paysages sauvages spectaculaires, s’étend sur quelque 300 km et compte plusieurs réserves naturelles et zones marines protégées.

    Dans sa décision, le juge de la Haute Court Gerald Bloem a déclaré que le droit de Shell d'explorer les eaux proches de la côte sauvage  "a été accordé sur la base d'un processus substantiellement défectueux". Le tronçon de littoral de 250 km (155 milles) de la province du Cap-Oriental est connu pour sa beauté naturelle et sa vie marine. Les militants ont fait valoir que de nombreux animaux marins (baleines, dauphins ou phoques) seraient affectés par les tests sismiques. Les communautés locales qui étaient également représentées dans l'affaire, ont déclaré que leurs droits coutumiers sur la terre et la pêche n'avaient pas été respectés. 

    C’est là, sur une zone plus de 6’000 km2, que le géant de l’énergie avait décidé de lancer un nouveau projet d’exploration sismique. Militants écologistes, pêcheurs et locaux s’y sont opposés, affirmant qu’il représente une menace pour la faune marine.

    Premier recours rejeté

    Des centaines de défenseurs de l’océan et d’amoureux de la nature avaient manifesté courant décembre sur plusieurs plages du pays et bloqué des stations essence de Shell, appelant par ailleurs à les boycotter.

    Au début du mois, la justice du pays avait rejeté un premier recours des militants écologistes. Mais le ministre sud-africain de l’Energie avait défendu le projet, accusant ses détracteurs de faire barrage aux investissements économiques dont le pays a besoin.

    Cette fois, dans un nouveau recours impliquant la communauté vivant dans ce coin de nature jusqu’ici préservé, la justice a donné raison aux défenseurs de l’environnement. Le tribunal de Grahamstown dans la province du Cap-Oriental (sud-est) a «interdit d’entreprendre des opérations de prospection sismique» au géant anglo-néerlandais, selon le jugement .

    Des détonations qui perturbent

    «Nous respectons la décision du tribunal et avons suspendu l’étude pendant que nous examinons le jugement», a déclaré un porte-parole de Shell.

    «Des études de cette nature sont menées depuis plus de 50 ans, avec plus de 15 ans de recherches scientifiques approfondies», a argumenté le porte-parole de Shell.

    «L’Afrique du Sud est fortement dépendante des importations pour une grande partie de ses besoins énergétiques. Si des ressources viables étaient découvertes en mer, cela pourrait contribuer de manière significative à la sécurité énergétique du pays», a-t-il fait valoir.

    Selon les écologistes, ces détonations risquent de perturber le comportement de la faune, son alimentation, sa reproduction ainsi que les migrations, notamment celle des baleines, la plupart des animaux marins s’appuyant sur l’audition.

    Une «immense victoire»

    «C’est une immense victoire», s’est félicitée Katherine Robinson, de l’ONG Natural Justice qui était partie civile dans le premier recours en justice contre le projet.

    «Si nous voulons lutter contre le changement climatique, nous devons résister à l’exploitation du pétrole et du gaz en Afrique du Sud et sur tout le continent, même si les lobbies sont incroyablement forts», a-t-elle insisté.

    Le projet de Shell devait s’étendre sur cinq mois sans interruption. Les recherches impliquaient l’envoi d’une puissante onde de choc toutes les dix secondes, 24/24h.

    Shell avait assuré prendre toutes les précautions pour «éviter ou minimiser l’impact sur les poissons, mammifères marins et autres espèces sauvages», dans la zone de recherche située à plus de 20 km de la côte dans des eaux profondes de 700 à 3’000 mètres.

     


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  • Des chasses traditionnelles d’oiseaux jugées «illégales»

    Le 6 août, le Conseil d’État a jugé «illégales» plusieurs techniques de chasse traditionnelles d’oiseaux utilisées dans les Ardennes et le Sud-Ouest de la France.

    Après la chasse à la glu, plusieurs méthodes de chasse traditionnelles d’oiseaux ont été interdites vendredi par une décision du Conseil d’État, saluée par les associations de protection des animaux et conspuée par les chasseurs. Saisi par les associations la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et One Voice, «le Conseil d’État annule aujourd’hui plusieurs autorisations de chasser les vanneaux huppés, pluviers dorés, alouettes des champs, grives et merles noirs à l’aide de filets (pantes, tenderies) ou de cages (matoles)». Ces autorisations «ne sont pas conformes aux exigences du droit européen relatif à la protection des oiseaux», annonce la plus haute juridiction administrative du pays dans un communiqué.

    La directive européenne «oiseaux» de 2009 interdit les techniques de capture massive d’oiseaux sans distinction d’espèces. Une dérogation est possible «à condition d’être dûment motivée et dès lors «qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante pour capturer certains oiseaux», rappelle le Conseil d’État. «Les autorisations ministérielles en cause ne sont pas dûment motivées» et le ministère n’a pas démontré que ces méthodes de chasse traditionnelles «sont les seules permettant de procéder à la capture des vanneaux huppés, pluviers dorés, alouettes des champs, grives et merles noirs». «Le seul motif de préserver ces méthodes de chasse dites «traditionnelles» ne suffit pas à les autoriser», poursuit le Conseil d’État.

    Effondrement des populations

    One Voice a immédiatement salué «une victoire historique dans la lignée de celle décrochée face aux chasseurs à la glu». Cette technique de piégeage avec des tiges enduites de colle a été interdite en juin par la justice, qui après des années de rebondissement, a jugé qu’elle met des oiseaux en danger autres que ceux visés par cette chasse, les grives et les merles.

    La LPO, de son côté, «demande désormais au gouvernement d’agir en conséquence et d’abolir ces pratiques d’un autre âge». «Si l’on pouvait concevoir l’usage des chasses traditionnelles en période de disette ou de guerre, il ne s’agit plus aujourd’hui que d’un simple loisir», constate son président Allain Bougrain Dubourg, rappelant que les oiseaux des villes et des champs voient leurs populations s’effondrer à cause des activités humaines en France. Des scientifiques ont encore tiré la sonnette d’alarme fin mai, demandant d’agir plus vite et plus fort pour changer les pratiques agricoles, notamment liées aux pesticides, renoncer à certaines chasses ou repenser la rénovation des bâtisses.

    La Fédération nationale des chasseurs (FNC) dénonce pour sa part «une décision insupportable» «sans le moindre fondement sérieux». «Elle en appelle au Premier ministre Jean Castex» et va «examiner tous les recours juridiques possibles». «Pour nous, les chasses traditionnelles sont l’essence même de la passion de la chasse et seront toujours au cœur de la défense de nos pratiques cynégétiques», indique son président Willy Schraen, cité dans le communiqué.

    Le Ministère de la transition écologique a soumis en juin 2021 à la consultation publique des arrêtés pour la saison 2021-2022 concernant 106’500 alouettes des champs, 5800 grives et merles noirs, 1200 vanneaux huppés et 30 pluviers dorés, dénonce la LPO. One Voice et la LPO se disent prêtes à attaquer ces nouveaux arrêtés. Le Ministère de la transition écologique prend «acte de cette décision du Conseil d’État qui annule plusieurs arrêtés ministériels de l’année dernière autorisant des chasses dites traditionnelles». «Les arrêtés de cette année, en cours de consultation, sont retirés», précise le Ministère à l’AFP, ajoutant qu’il va «faire le point sur ce dossier en analysant précisément la décision du Conseil d’État».

     


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  • La chasse à la glu déclarée illégale par la justice française

    Le Conseil d’État français a jugé lundi 28 juin 2021 que cette technique de piégeage d’oiseaux controversée était contraire au droit européen.

    La chasse à la glu a définitivement été jugée illégale, par la plus haute juridiction administrative française, mettant un terme à des années de bataille entre partisans et adversaires de cette méthode controversée.

    Après avoir interrogé la justice européenne, qui avait estimé en mars que cette technique de piégeage cause un dommage «irrémédiable» à tous les oiseaux capturés, le Conseil d’État a définitivement annulé les dérogations accordées par l’État pour cette chasse, jugée «contraire au droit européen».

    Cette méthode de chasse dite «traditionnelle» est pratiquée dans cinq départements du sud-est de la France (Alpes-de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Bouches-du-Rhône, Vaucluse et Var).

    Destinée aux grives et aux merles, elle consiste à piéger des oiseaux sur des tiges enduites de colle, appelées gluaux. Les oiseaux ainsi capturés sont mis en cage et servent, en chantant, à en attirer d’autres pour les chasseurs.

    Mais les défenseurs de l’environnement se battent depuis des années en justice pour la faire interdire, dénonçant une méthode «cruelle» et non sélective qui conduit à la capture d’autres oiseaux que ceux visés, y compris des espèces protégées. Les chasseurs assurent, eux, que les oiseaux capturés par erreur sont nettoyés et relâchés.

    Saisi à de nombreuses reprises pour faire annuler les décrets gouvernementaux accordant des dérogations permettant cette chasse au motif de la tradition, le Conseil d’État avait fini par se tourner vers la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), pour savoir si elle était conforme à la directive «oiseaux» de l’UE.

    Vouloir préserver des traditions ne suffit pas

    La CJUE avait répondu en mars qu’«en dépit d’un nettoyage, les oiseaux capturés subissent un dommage irrémédiable, les gluaux étant par nature susceptibles d’endommager le plumage de tous les oiseaux capturés», rendant dès lors prévisible son interdiction par la justice administrative française. Qui a donc rendu lundi une série de décisions dans des affaires pendantes annulant la réglementation dérogatoire française.

    Le Conseil relève dans un communiqué que «ni le gouvernement, ni la fédération de chasseurs, n’ont apporté de preuves suffisantes» permettant d’affirmer que d’autres espèces ne sont pas piégées ou que «les oiseaux capturés accidentellement ne subiraient que des dommages négligeables, une fois relâchés et nettoyés».

    Par ailleurs, il estime que «le seul objectif de préserver ces traditions ne suffit pas à justifier une dérogation aux interdictions de principe que pose la directive» européenne et qu’il n’a pas été démontré qu’aucune alternative ne serait possible.


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  •  Tribunal des droits de la nature

    “Pour faciliter leurs efforts, les défenseurs des Droits de la Nature [GARN] ont créé une nouvelle institution internationale de gouvernance : le Tribunal international des droits de la nature. […] L’idée a été inspirée par le Tribunal international des crimes de guerre et le Tribunal permanent des peuples, créés par des citoyens pour enquêter sur les violations des droits de l’homme et les rendre publiques. Tout comme ces tribunaux ont exercé une pression sociale pour créer et renforcer le droit international des droits de l’homme, le Tribunal international est censé favoriser le droit international des droits de la nature”. CRAIG M. KAUFFMAN et PAMELA L. MARTIN

    Le Tribunal international des droits de la nature a été créé par l’Alliance mondiale pour les droits de la nature en janvier 2014. Le Tribunal a pour objectif de créer un forum permettant aux personnes du monde entier de parler au nom de la nature, de protester contre la destruction de la Terre – destruction souvent sanctionnée par les gouvernements et les entreprises – et de formuler des recommandations sur la protection et la restauration de la Terre. Le tribunal s’attache également à permettre aux peuples autochtones de faire part à la communauté mondiale de leurs préoccupations et solutions spécifiques concernant la terre, l’eau et la culture.

    Le Tribunal international des droits de la nature s’est réuni à quatre reprises. Le Dr Vandana Shiva (Inde) a présidé le premier Tribunal international des droits de la nature, qui s’est réuni à Quito, en Équateur, en janvier 2014. Le Tribunal a ensuite tenu des audiences à Lima, au Pérou (décembre 2014), dans un tribunal présidé par Alberto Acosta (Équateur). Le troisième Tribunal international s’est tenu à Paris, en France, en décembre 2015, lors de la COP21, présidée par Cormac Cullinan (Afrique du Sud). Le dernier Tribunal s’est tenu à Bonn, Allemagne, en novembre 2017 lors de la COP23, présidé par Tom Goldtooth (Dine’ and Dakota, USA)

    Bien que les tribunaux ne soient pas contraignants, ils prouvent leur capacité à influer sur les résultats sur le terrain. Le dernier tribunal, qui s’est tenu à Bonn, en Allemagne, a entendu une affaire concernant un projet de route traversant le parc national et le territoire indigène (TIPNIS) en Bolivie. Cette affaire a été particulièrement médiatisée et, en raison de la couverture médiatique générée par le tribunal, le président bolivien Evo Morales a interrompu (temporairement) le projet de route. Le Tribunal a envoyé une commission d’experts en droits de la nature du GARN pour étudier les conditions sur le terrain dans le TIPNIS en août 2018, qui a ensuite publié un rapport sur les impacts du projet routier proposé, présenté dans le cadre de la Déclaration universelle des droits de la Terre nourricière et d’autres documents juridiques pertinents sur les droits de la nature. Le Tribunal rendra sa décision finale sur l’affaire en mai 2019.

    En outre, les chambres régionales du Tribunal ont tenu de nombreuses audiences, notamment

    • Deux audiences à Quito pour Yasuní (le 11 avril 2014 – menées par Boaventura de Sousa Santos ; et le 15 août 2014, menées par George Caffentzis) ;
    • Deux audiences dans la baie de San Francisco, la première contre Chevron (5 octobre 2014, menée par Anuradha Mittal) et la seconde pour l’écosystème du delta (20 avril 2016, avec la participation de Pennie Opal Plant, Liz Husked, Gary Mulcahy et Tim Stroshane) ;
    • Une première audition à Brisbane, en Australie, sur la Grande Barrière de Corail (15 octobre 2014, à laquelle ont participé d’éminents scientifiques et juristes australiens).

    La création d’un tribunal régional permanent en Australie, qui a tenu sa première audience complète le 22 octobre 2016. Ce tribunal est unique en Australie, car c’est la première fois que des autochtones et des non-autochtones se sont unis pour parler au nom du monde naturel et demander la transformation du système juridique afin de reconnaître les droits de la nature.

    QU'EST-CE QU'UN TRIBUNAL INTERNATIONAL DES DROITS DE LA NATURE ?

    Concept

    Les droits de la nature sont une nouvelle approche du droit environnemental, qui considère la nature non pas comme une série de ressources que les êtres humains peuvent utiliser, mais comme un sujet vivant avec ses propres intérêts et droits.

    Le Tribunal international des droits de la nature a été créé pour fournir des alternatives systémiques basées sur les droits de la nature aux fausses solutions et aux négociations ratées des États nations gouvernants.

    Ce “tribunal populaire” est un moyen de recadrer et de juger des affaires importantes en matière de justice environnementale et sociale dans le contexte d’une jurisprudence de la Terre fondée sur les droits de la nature.

    Le Tribunal fournit un cadre pour l’éducation de la société civile et des gouvernements sur les principes fondamentaux des Droits de la Nature et un instrument pour les experts juridiques afin d’examiner les constructions nécessaires pour intégrer plus complètement les Droits de la Nature.

    Mission

    Faire des droits de la nature une partie essentielle de notre système juridique et de notre société en montrant comment les tribunaux et les juges devraient traiter les affaires environnementales par le biais des tribunaux des droits de la nature .

    Le tribunal fournit un cadre pour sensibiliser et éduquer la société civile et les gouvernements sur les principes fondamentaux des droits de la nature et un instrument permettant aux experts juridiques d’examiner les constructions nécessaires pour intégrer plus complètement les droits de la nature.

    Valeurs

    • Les intérêts des êtres non-humains sont d’égale importance pour les intérêts humains.
    • Notre société a besoin d’un changement de paradigme fondamental dans notre relation avec la nature.
    • Notre survie en tant qu’espèce dépend de notre capacité de changement à ce moment fondamental de l’histoire.
    • Les idées que nous promouvons sont un outil fondamental qui peut changer les perspectives de l’humanité pour le mieux.
    • Le processus décisionnel fournit une plateforme pour une analyse juridique éclairée de divers cas
     

     Pour en savoir plus, cliquez sur ce lien: https://www.rightsofnaturetribunal.org/tribunals/europe-2020/?lang=fr
     

     


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  • Trente pays unissent leurs forces contre les déchets plastiques en mer

    Des pays de différentes régions du monde font équipe avec l'Organisation maritime internationale (OMI) et l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) pour lutter contre les déchets plastiques en mer et à nettoyer les océans dans le cadre du projet GloLitter.

    Le financement initial de ce projet provient du gouvernement norvégien, par le biais de l'Agence norvégienne de coopération pour le développement (NORAD), a précisé la FAO dans un communiqué de presse.

    GloLitter vise à aider les transports maritimes et les pêcheries à progresser vers un avenir comprenant moins de plastique. Pour atteindre cet objectif, le projet aidera les pays en développement à mettre en œuvre les meilleures pratiques en matière de prévention, de réduction et de contrôle des déchets plastiques en mer provenant de ces secteurs.

    Les déchets plastiques ont des effets dévastateurs sur nos océans, la faune et la flore marines et la santé humaine. Ils ont également des répercussions mesurables sur les secteurs de la pêche et des transports maritimes.

    En effet, les équipements de pêche rejetés en mer peuvent poser un risque sérieux pour les pêcheurs, puisque les filets ou les lignes peuvent s'emmêler dans les hélices des navires ou endommager les moteurs. Il y a également des conséquences économiques lorsque les pêcheurs perdent leurs équipements ou que des poissons sont capturés dans des équipements abandonnés.

     

    Les conteneurs perdus peuvent aussi présenter un risque de collision avec les navires. Il est essentiel de réduire et de prévenir le rejet des déchets plastiques en mer pour assurer la sauvegarde des ressources marines côtières et mondiales.

    « Je suis ravi que plus de 30 pays se soient engagés dans cette initiative et travaillent avec l'OMI et la FAO pour résoudre ce problème », s’est félicité Jose Matheickal, chef du département des partenariats et des projets de l'OMI.

    « Les déchets plastiques ont un effet dévastateur sur la vie aquatique et la santé humaine », a déclaré de son côté le directeur des Pêches et de l'Aquaculture de la FAO, Manuel Barange. « Cette initiative représente une étape importante dans la lutte contre ce problème et contribuera à protéger les écosystèmes ainsi que les moyens d'existence de ceux qui dépendent de l'océan ».

    Pays chefs de file et partenaires

    Cinq régions seront représentées dans cet effort mondial : l'Asie, l'Afrique, les Caraïbes, l'Amérique latine et le Pacifique.

    Dix pays ont été confirmés en tant que pays partenaires principaux et vingt autres pays ont été sélectionnés à titre de pays partenaires du projet GloLitter.

    Les pays partenaires principaux joueront un rôle de meneur dans leurs régions respectives et feront la promotion de mesures nationales à l'appui du Plan d'action de l'OMI sur les détritus marins et des Directives volontaires de la FAO sur le marquage des engins de pêche. Les pays partenaires principaux et les pays partenaires travailleront en collaboration, grâce à la mise en place de jumelages, afin de bâtir un soutien régional pour le projet.

    Les 10 pays partenaires principaux sont : le Brésil, le Costa Rica, la Côte d'Ivoire, l'Inde, l'Indonésie, la Jamaïque, le Kenya, Madagascar, le Nigéria et Vanuatu.

     

    Les 20 pays partenaires sont : l'Argentine, Cabo Verde, la Colombie, l'Équateur, la Gambie, les Îles Salomon, le Mozambique, le Nicaragua, Panama, le Pérou, les Philippines, la République-Unie de Tanzanie, le Sénégal, le Sri Lanka, le Soudan, la Thaïlande, le Timor-Leste, le Togo, Tonga et le Viet Nam.

    Une action globale et concrète

    Au cours des prochains mois, les unités de coordination du projet de l'OMI et de la FAO travailleront en collaboration avec les pays partenaires principaux afin d'élaborer des plans de travail nationaux adaptés aux besoins de chaque pays, de fournir l'assistance technique et la formation nécessaires à la mise en œuvre de ces plans et de faciliter les accords de jumelages entre pays partenaires principaux et pays partenaires.

    Le projet GloLitter permettra aux pays partenaires d'acquérir des connaissances et des outils, ce qui comprend des documents d'orientation, du matériel de formation et des méthodologies pour les aider à faire respecter les réglementations existantes. Il s'agit notamment des règles sur la prévention de la pollution par les ordures prévues par l'annexe V de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (MARPOL), qui interdisent le rejet en mer, par les navires, de matières plastiques, incluant les engins de pêche. Un autre régime conventionnel, la Convention de Londres et le Protocole de Londres, réglemente le rejet de déchets provenant des navires, autorisant uniquement l'immersion de certains types de déchets non dangereux.

    Le projet fera aussi la promotion du respect des différents instruments de la FAO, y compris les Directives volontaires sur le marquage des engins de pêche, en plus de promouvoir les initiatives existantes, telles que la Global Ghost Gear Initiative.

    Le projet se penchera sur la disponibilité et le caractère adéquat des installations de réception portuaire et leurs liens avec les systèmes nationaux de gestion des déchets. Il élaborera un « plan modèle de gestion des déchets portuaires », qui comprendra le concept d'économie circulaire et qui sera mis à l'essai dans des ports désignés dans les pays participants.

    Le projet abordera la question du traitement des engins de pêche abandonnés, perdus ou rejetés. Des initiatives pilotes seront menées avec des organisations de femmes du secteur des pêches afin de réduire l'utilisation du plastique dans les pêcheries, la transformation et la commercialisation du poisson, et de collecter le plastique pour le recycler.

     

    Le projet facilitera la mise en place de partenariats public-privé afin de favoriser la mise au point de solutions de gestion des déchets plastiques rejetés dans le milieu marin, notamment en examinant les moyens de diminuer l'utilisation du plastique, de même que des possibilités de réutiliser et de recycler les plastiques.
      


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  • Captures accidentelles de dauphins

    Le recours : L’ONG Sea Shepherd a demandé au juge des référés du Conseil d'État français de suspendre la pêche présentant un risque de capture accidentelle de dauphins dans le golfe de Gascogne de janvier à mars et de mi-juillet à mi août et de renforcer les dispositifs de contrôle, afin de réduire ces captures.

    La décision du Conseil d'État : Les demandes de l’ONG dépassent les pouvoirs du juge des référés, qui est un juge de l’urgence et des solutions en principe immédiates et provisoires.

    D’après des données du CNRS, le juge observe que les échouages de dauphins se sont fortement accrus depuis 2016 dans le golfe de Gascogne, et que ces échouages sont dans la plupart des cas dus à une mort dans un engin de pêche.

    Sur injonction du Conseil d’Etat par une décision « au fond » de juillet 2020, la ministre de la mer a étendu en novembre l’obligation pour tous les navires français de plus de 12 mètres d’utiliser des répulsifs sonores censés permettre une baisse de 21% des captures accidentelles de cétacés. Un plan d’action a suivi cette première mesure, comprenant : la déclaration obligatoire des captures accidentelles, des programmes d’observation aérienne pour estimer l’abondance des dauphins et leur aire de distribution et un projet international avec l’Espagne et le Portugal. 

    Cette année, le nombre d’échouages de dauphins a été de 657, après une moyenne de 850 les quatre dernières années.

    Si l’ONG estime que les mesures récemment mises en place sont encore insuffisantes, le juge des référés rejette aujourd’hui ses demandes.

    La fermeture des zones de pêches durant 4 mois ne serait efficace que si elle était appliquée année après année, durant une longue période. Cela revient donc à demander au juge des référés d’ordonner à l’État une mesure réglementaire non provisoire, ce qui dépasse ses pouvoirs en tant que juge de l’urgence. La demande de l’ONG d’ordonner la présence d’observateurs et de dispositifs de contrôle à distance sur les bateaux de pêche français est une également une mesure non provisoire que le juge des référés ne peut satisfaire.

    Lire l'ordonnance n°450592

    Le CE français a donc estimé que puisque que les mesures de protection des dauphins (fermeture de zones de pêche) n’ont d’efficacité que si elles sont inscrites dans le long terme, il n’était dès lors pas de sa compétence de prendre une mesure d’urgence et par nature, temporaire.

    Si on résume, cela signifie que tant qu’on n’a pas décidé de protéger les dauphins sur le long terme, il ne sert à rien de leur accorder un sursis. Tous ceux qui auraient pu être épargnés par cette mesure d’urgence vont donc mourir.

    Le juge ne s’est pas prononcé sur la mise en œuvre du principe de précaution que nous avions longuement développé et qu’il relève pourtant dans sa décision « les incertitudes scientifiques sur l’abondance de la population ». L’application du principe de précaution aurait dû amener le juge à prononcer des mesures minimales d’urgence, d’autant que les scientifiques alertent sur le fait que si la diminution de la population de dauphins est visible, c’est qu’il est déjà trop tard. Des mesures d’urgence ont pour but d’éviter à tous prix d’atteindre ce point de non retour, équivalent au déclenchement d’un processus d’extinction que nous ne serions plus en mesure de stopper.


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    Le Cour de cassation a rejeté mercredi 21 octobre 2020 le pourvoi formé par Monsanto, filiale du groupe Bayer depuis 2018, ce qui rend définitive sa condamnation dans le dossier l'opposant à l'agriculteur Paul François.

    La fin d'une longue procédure. La Cour de cassation a rejeté mercredi le pourvoi formé par Monsanto, filiale du groupe Bayer depuis 2018, ce qui rend définitive sa condamnation dans le dossier l'opposant à l'agriculteur Paul François, intoxiqué après avoir inhalé des vapeurs de l'herbicide Lasso. Cette décision ouvre la voie à un épilogue dans ce marathon judiciaire entamé en 2007 et au cours duquel Paul François, céréalier de Charente, a eu gain de cause à trois reprises en justice, dont la dernière fois en avril 2019 à Lyon.

    Paul François, céréalier de Charente, avait été intoxiqué en avril 2004 après avoir inhalé des vapeurs de Lasso, un herbicide de Monsanto finalement interdit en France trois ans plus tard, et avait été longuement hospitalisé.

    De graves troubles neurologiques

    Depuis, l'agriculteur accuse le groupe d'être le responsable de son intoxication et a porté l'affaire en justice, réclamant plus d'un million d'euros. Il assure aussi souffrir de graves troubles neurologiques, ce que contestent Monsanto et, désormais, Bayer.

    La justice a déjà partiellement donné raison à M. François à trois reprises : elle a jugé que Monsanto aurait dû signaler le danger spécifique d'utiliser le produit en cas de travaux dans des cuves, mais ne s'est pas prononcée sur la toxicité même du Lasso.


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  • Sommet sur la biodiversité : « l'homme, l'espèce la plus dangereuse de l'histoire mondiale »

    Des hauts fonctionnaires des Nations Unies qui travaillent à la préservation du monde naturel ont appelé à « agir maintenant » à l’occasion du Sommet sur la biodiversité qui s’est ouvert mercredi 30 septembre 2020 et au cours duquel les dirigeants mondiaux entendent réaffirmer leur engagement en faveur de cette cause.

    « Nous n'avons pas le temps d'attendre. La perte de la biodiversité, la perte de la nature, est à un niveau sans précédent dans l'histoire de l'humanité », a déclaré Elizabeth Mrema, Secrétaire exécutive de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique, à ONU Info dans la SDG  Media Zone.

    « Nous sommes l'espèce la plus dangereuse de l'histoire mondiale », a-t-elle déploré. 

    La Convention sur la diversité biologique est un traité international adopté lors du Sommet de la Terre des Nations Unies au Brésil en 1992. Elle a trois objectifs : la conservation de la diversité biologique, l'utilisation durable de la nature et le partage juste et équitable des avantages découlant de la science génétique.

    Dans le cadre de la Convention, les pays ont adopté en 2010 les Objectifs d’Aichi sur la biodiversité - un groupe de 20 objectifs pour conserver la biodiversité qui vont de la préservation des espèces à la réduction de la déforestation d'ici 2020. Les Objectifs d'Aichi sont à la biodiversité ce que l'Accord de Paris sur le climat est au réchauffement climatique. 

    Les pays avaient jusqu'à cette année pour atteindre les Objectifs, puis passer à la création d'un cadre mondial de la biodiversité pour l'après-2020. Mais malgré quelques progrès, les objectifs - qui vont de l'arrêt de l'extinction des espèces à la réduction de la pollution et à la préservation des forêts - n'ont pas été atteints.   

    « Si vous regardez le tableau de bord, comme un bulletin scolaire, le plus élevé est inférieur à 30% des progrès », a déclaré Mme Mrema.

    « Pas un seul objectif d'Aichi ne sera pleinement atteint, de sorte que sur les 20 objectifs, à eux seuls, en 10 ans, nous avons échoué », a-t-elle ajouté. 

    Des discussions sont maintenant en cours pour un nouveau cadre qui s'appuie sur ces « échecs », a précisé Mme Mrema. 

    Le document en est encore à ses débuts, il est actuellement examiné dans le cadre de consultations informelles, mais il doit être prêt à être adopté lors de la 15ème Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique qui se tiendra en Chine en 2021.

    L'une des principales différences entre les Objectifs de biodiversité d'Aichi et le cadre post-2020 sera la mise en œuvre. Après Aichi, certains pays ont dû créer des stratégies nationales pour agir sur les objectifs. Celles-ci sont maintenant en place.

    « Nous ne demandons pas de réinventer la roue, donc la mise en œuvre devrait pouvoir commencer immédiatement », a déclaré Mme Mrema. 

    Le nouveau cadre comprendra également des ressources telles que le transfert de technologies et le renforcement des capacités, qui n'étaient pas considérés comme des priorités à Aichi.

    Pour créer une dynamique en faveur de cette nouvelle façon de vivre avec la nature, le Président de l'Assemblée générale des Nations Unies a convoqué ce mercredi le Sommet sur la biodiversité, où les dirigeants mondiaux sont censés déclarer les engagements de leurs pays envers la nature et un cadre pour la biodiversité après 2020.   

    Ils ne vont pas dire : « Nous continuerons sur la voie de la destruction ». Ils vont dire :  « Nous allons nous engager sur la voie de la durabilité », a déclaré Inger Andersen, la cheffe du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE). 

    Mme Andersen, qui s'est exprimée aux côtés de Mme Mrema dans la SDG Media Zone, a évoqué d'autres voix qui se feront entendre cette semaine dans la salle de l'Assemblée générale et lors des sessions de dialogue dites « des leaders » qui porteront sur le développement durable et sur la science et la technologie.

    « Tout comme dans le mouvement pour le climat, puis au Sommet sur l'action climatique, nous avons vu l'énergie que les jeunes apportent, dans la salle, dans la rue, sur les tables à manger, à la maison, dans la salle de classe, et finalement dans l'isoloir », a déclaré Mme Andersen à propos de l'inclusion des jeunes dans les discussions de la semaine. « C'est une énergie que nous voulons voir aussi pour la nature et la biodiversité ».

    Elle a souligné la voix des peuples autochtones, les qualifiant de « défenseurs de l'environnement », de « défenseurs de la nature » et de « détenteurs du savoir » dont « la voix, au sein des Nations Unies et au-delà, est irrépressible et critique ».

    La semaine comprendra la participation du secteur privé et mettra en évidence la sensibilisation des participants à l'agriculture et à la manière d'encourager plus efficacement l'agriculture en accord avec la préservation de la biodiversité.

    « Nous mangeons tous, donc nous devons tous comprendre que manger est important », a déclaré Mme Andersen.

    « Mais nos pratiques agricoles doivent changer pour le mieux, et cela signifie que la grande agriculture a un point à faire sur sa liste en ce qui concerne la façon dont nous le faisons, et les décideurs politiques ont un point à faire pour les aider à changer », a-t-elle ajouté.

    Si ces responsables des Nations Unies espèrent une forte participation de divers groupes, la voix la plus importante est celle des chefs d'État qui ont la capacité de diriger le changement de politique.

    « Il est temps d'agir. Et comprendre, par conséquent, que les chefs d'État maintenant ce qu'ils diront sera vraiment important, parce que les générations futures les jugeront », a déclaré Mme Andersen, faisant écho à Mme Mrema.

    « Allons-nous être les leaders qui ont laissé les espèces et la nature disparaître ? Pour que votre petit-fils ou le mien ne voit pas ce magnifique animal, cette fleur incroyable ou l'être même de l'écosystème qui nous fait vivre ? », s’est-elle interrogée.

    « Ce n'est pas rien. C'est très, très grand, parce que c'est l'avenir [de la] sécurité alimentaire, parce que c'est l'avenir de la paix, parce que c'est l'avenir de l'humanité telle que nous la comprenons », a-t-elle conclu.


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  •  Les baleiniers du Japon relancent la chasse commerciale après 31 ans de pause

    Après 31 ans de pause, des navires baleiniers japonais ont repris la mer pour leur première mission de chasse commerciale.

    Des navires baleiniers japonais ont repris la mer lundi pour leur première mission de chasse commerciale en plus de trois décennies, actant la décision prise il y a six mois par le gouvernement de quitter la Commission baleinière internationale (CBI) et de s'affranchir ainsi d'un moratoire.

    Sous le ciel nuageux de Kushiro (sur l'île septentrionale de Hokkaido), cinq navires munis de harpons ont appareillé après une cérémonie où plusieurs élus ont revendiqué la légitimité de cette tradition.

    "C'est une petite industrie, mais je suis fier de chasser les baleines. La pratique existe depuis plus de 400 ans dans ma cité", a expliqué à l'AFP Yoshifumi Kai, président d'une association de pêcheurs de baleines, tout excité de repartir en mer.

    Idem pour le jeune Hideki Abe qui, compte tenu de son jeune âge, 23 ans, n'a encore jamais participé à une mission de ce type.

    "Je suis un peu nerveux, mais heureux que nous puissions commencer. Je souhaite que davantage de personnes goûtent de la baleine, au moins une fois", a-t-il confié avant le départ.

    Le navire-usine Nisshin Maru, bâtiment amiral de la flotte baleinière nippone, et plusieurs autres embarcations ont aussi quitté le port de Shimonoseki (sud-ouest), où trône une énorme statue de baleine.

    "Nous estimons que les baleines sont des ressources marines comme les poissons et qu'elles sont utilisables sur la base de critères scientifiques", a expliqué à l'AFP un responsable du ministère de l'Agriculture, des Forêts et de la Pêche.

    "Nous déterminons des quotas de sorte à ne pas nuire aux espèces", a-t-il précisé. Le maximum d'ici décembre est fixé à 227 prises.

    Un rite auquel tient une partie de la population

    Les baleiniers n'iront pas tuer en haute mer, comme il l'ont fait ces trente dernières années "pour des raisons scientifiques".

    Le Japon avait débuté ses "missions de recherches" en Antarctique et dans le nord-est du Pacifique il y a respectivement 32 et 25 ans, renonçant alors à une pêche purement commerciale, mais utilisant une "exception scientifique", tolérée par la CBI.

    Durant ces décennies, l'archipel n'a cessé d'être critiqué par les défenseurs des cétacés pour ses façons de procéder jugées cruelles, alors que des méthodes non létales existent pour mener les études voulues, selon ses détracteurs.

    En outre, si les chercheurs étaient certes les premiers à se pencher sur les baleines rapportées, une partie de leur chair finissait sur les étals des poissonniers, malgré un appétit peu important pour cette chair.

    Mais il y a une volonté et fierté de préserver un rite auquel tient une partie de la population, notamment des personnes âgées qui se souviennent que la baleine était leur seule source importante de protéines durant la disette d'après-guerre.

    Pour certaines communes, la pêche à la baleine est une raison d'être sinon économique, du moins culturelle et morale.

    C'est le cas de Shimonoseki, où les cantines scolaires initient les enfants à cette tradition culinaire pour ressusciter l'habitude de consommation.

    L'Islande ne chassera pas la baleine

    Au-delà de la condamnation de cette pratique, Patrick Ramage, directeur du programme conservation marine du Fonds international pour le bien-être animal (Ifaw), voit dans la reprise de la chasse commerciale et l'arrêt de la pêche scientifique en Antarctique une sorte de baroud d'honneur du Japon.

    "J'y ai beaucoup réfléchi pendant de nombreuses années. C'était un fantasme et maintenant le fantasme se réalise. Le Japon est en train d'arrêter la chasse à la baleine en haute mer, pas encore un arrêt complet, mais c'est un énorme pas vers la fin", expliquait-il lors d'une récente conférence au Japon.

    "Cette industrie (de chasse à la baleine) va se noyer très rapidement", prédisait-il.

    "On nous en servait à la cantine quand j'étais petite, mais je ne pense pas que j'en mangerai de nouveau. Je trouve que le Japon devrait davantage faire ses choix en tenant compte du reste du monde qui dit que ce n'est pas bien", a confié à Tokyo une jeune Japonaise de 30 ans désireuse de garder l'anonymat.

    A l'inverse, l'Islande s'abstiendra de chasser pour la première fois depuis 2002, les deux entreprises spécialisées ayant décidé de renoncer à la saison 2019.

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    Triste jour pour les cétacés. Le Japon va reprendre dès lundi la chasse commerciale à la baleine 

    Le Japon relance officiellement la chasse commerciale à la baleine, actant la décision prise il y a six mois de quitter la Commission baleinière internationale (CBI) et de s'affranchir ainsi d'un moratoire appliqué durant trois décennies.

    "Nous estimons que les baleines sont des ressources marines comme les poissons et qu'elles sont utilisables sur la base de critères scientifiques", a expliqué à l'AFP un responsable du ministère de l'Agriculture, des Forêts et de la Pêche.

    "Nous déterminons des quotas de sorte à ne pas nuire aux espèces", a-t-il précisé.

    Le bateau-usine Nisshin Maru, navire amiral de la flotte baleinière nippone, et plusieurs autres navires quitteront le port de Shimonoseki (sud-ouest), où trône une énorme statue de baleine, pour aller chasser des cétacés le long des côtes japonaises, dans la zone d'exclusivité économique de l'archipel. Une autre flotte partira de Kushiro (île septentrionale de Hokkaido).

    "Nous sommes tout excités par cette reprise de la pêche", a commenté Yoshifumi Kai, qui préside une association de pêcheurs.

    Une partie de leur chair finissait déjà sur les étals des poissonniers

    Les baleiniers n'iront pas tuer en haute mer, comme il l'ont fait ces trente dernières années "pour des raisons scientifiques".

    Le Japon avait débuté ses "missions de recherches" en Antarctique et dans le nord-est du Pacifique il y a respectivement 32 et 25 ans, renonçant alors à une pêche purement commerciale, mais utilisant une "exception scientifique", tolérée par la CBI. Durant ces décennies, l'archipel n'a cessé d'être critiqué par les défenseurs des cétacés pour ses façons de procéder jugées cruelles, alors que des méthodes non létales existent pour mener les études voulues, selon ses détracteurs.

    Lire aussi :Des pêcheurs japonais ont tué 177 baleines dans le Pacifique

    En outre, si les chercheurs étaient certes les premiers à se pencher sur les baleines rapportées, une partie de leur chair finissait sur les étals des poissonniers, ce même si les consommateurs de baleine ne courent pas les rues.

    Mais il y a une forme de volonté de préserver une tradition qui reste ancrée chez une partie de la population, notamment des personnes âgées qui se souviennent que la baleine était leur seule source importante de protéines durant la disette d'après-guerre.

    Et puis il y a une fierté de certaines cités pour lesquelles la pêche à la baleine est comme une raison d'être sinon économique du moins culturelle et morale.

    C'est le cas de Shimonoseki. Ici, depuis le mois de février, de la baleine est occasionnellement servie dans les cantines scolaires afin d'initier les enfants à cette tradition culinaire de la région et de ressusciter l'habitude de consommation.

    Un baroud d'honneur

    Au-delà de la condamnation de cette pratique, Patrick Ramage, directeur du programme conservation marine du Fonds international pour le bien-être animal (Ifaw), voit dans la reprise de la chasse commerciale et l'arrêt de la pêche scientifique en Antarctique une sorte de baroud d'honneur du Japon.

    "J'y ai beaucoup réfléchi pendant de nombreuses années. C'était un fantasme et maintenant le fantasme se réalise. Le Japon est en train d'arrêter la chasse à la baleine en haute mer, pas encore un arrêt complet mais c'est un énorme pas vers la fin", a-t-il expliqué lors d'une récente conférence au Japon.

    "Cette industrie (de chasse à la baleine) va se noyer très rapidement", prédit-il, estimant qu'elle est entretenue par des subventions pour une population de consommateurs qui va finir par s'éteindre.

    "On nous en servait à la cantine quand j'étais petite, mais je ne pense pas que j'en mangerai de nouveau. Je trouve que le Japon devrait davantage faire ses choix en tenant compte du reste du monde qui dit que ce n'est pas bien", a confié à Tokyo une jeune Japonaise de 30 ans désireuse de garder l'anonymat.

    Certains spécialistes japonais jugent aussi que le retrait de la CBI est une erreur: "le Japon doit y revenir et défendre le principe d'une gestion durable des ressources", estime Masayuki Komatsu, un ancien négociateur auprès de l'instance internationale.


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