• L'ONU inquiet d'une possible dérive génocidaire

    Un Comité de l'ONU a présenté vendredi 12 août 2016 à Genève un rapport accablant sur des centaines d'exécutions, de cas de torture et de viols commis au Burundi et a donné deux mois au gouvernement pour répondre de ces accusations. Il a demandé des investigations sur les abus présumés.

    «La torture est motivée par des raisons politiques» au Burundi et des indications laissent penser qu'elle est dirigée avant tout contre une ethnie, a mis en garde devant la presse son président Jens Modvig. De tels actes contre un groupe, s'ils sont «systématiques», pourraient être considérés comme une alerte vers une possible détérioration vers un génocide.

    348 exécutions extrajudiciaires

    Le recours à la torture ne «donne aucun signe d'amélioration», a renchéri le rapporteur du Comité sur ce pays Sébastien Touzé. Il déplore une «rupture complète de l'état de droit et un état de tension politique» très alarmant.

    Le Comité se dit «particulièrement troublé» par le chiffre de 348 exécutions extrajudiciaires perpétrées en un an depuis le début des violences liées au processus électoral. Ces données avaient été dévoilées récemment par le Haut Commissariat aux droits de l'homme.

    Plusieurs mécanismes

    La présence de neuf fosses communes présumées inquiète également le Comité. Il demande au gouvernement burundais «de mettre en oeuvre sans délai les moyens nécessaires afin de localiser, préserver et mettre en surveillance» ces sites.

    Une commission d'enquête indépendante devra ensuite identifier les cadavres si les allégations se vérifient mais le Comité relève que les autorités ont reconnu l'authenticité de plusieurs sites. Autre demande, les familles des victimes doivent pouvoir participer comme partie civile et obtenir des réparations adaptées.

    Plus de 650 actes de torture

    Le Comité souhaite aussi des investigations sur plus de 30 disparitions forcées, un usage excessif de la force et plus de 650 actes de torture. Il demande la fermeture de centres de détention qui ne sont pas reconnus officiellement. Enfin, il exige l'accès aux prisons et aux commissariats pour tous les observateurs dépêchés par le Haut Commissariat, le Conseil des droits de l'homme et l'Union africaine.

    Des mécanismes nationaux et indépendants de prévention de la torture et de dépôt de plaintes devront aussi être mis en place. Les milices devront être contrôlées par les forces de sécurité et leur participation à des exécutions examinée.

    Les personnes responsables d'abus sexuels devront être poursuivies et leurs victimes soutenues. Le Comité appelle aussi le gouvernement burundais à mieux sensibiliser les membres des forces de police à leurs responsabilités liées à la Convention contre la torture.

    Premier boycott

    Il lui demande encore de protéger les minorités, cesser toute incitation à la haine, libérer les personnes détenues arbitrairement et garantir des procès équitables. Les membres de la société civile doivent par ailleurs pouvoir être défendus.

    L'examen spécial du Burundi par le Comité a eu lieu fin juillet, avec deux ans d'avance. Lundi, l'enceinte avait dénoncé les représailles contre quatre avocats burundais qui avaient coopéré avec lui. Ils ont depuis quitté le pays.

    Les avocats avaient contribué à un rapport d'ONG. Après la publication de ce document, la délégation officielle burundaise avait boycotté la réunion où elle devait répondre aux remarques du Comité, une première pour un Etat partie.

    «Nous encourageons à une reprise d'un dialogue constructif», a déclaré M. Modvig. Le Comité a invité l'ambassadeur burundais à Genève à le rencontrer. Même si la possibilité d'une mise en oeuvre des recommandations ne semble pas «encourageante», il est persuadé que la situation changera.

    Le Burundi a indiqué dans une lettre reçue jeudi que les poursuites contre les quatre avocats n'étaient pas liées à leur participation aux travaux du Comité. Un rejet que les membres de l'enceinte n'estiment pas crédible.


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