• La dictature brésilienne coupable de «crimes contre l’Humanité»

    La dictature brésilienne coupable de «crimes contre l’Humanité»

    La Commission nationale de la Vérité a travaillé presque trois ans pour établir la responsabilité pénale de 377 militaires brésiliens.

    La présidente Dilma Rousseff n’a pu retenir ses larmes en recevant mercredi 10 décembre 2014  le volumineux rapport de la Commission Nationale de la Vérité (CNV) qui a travaillé pendant deux ans et sept mois sur la période dictatoriale qu’a connue le Brésil entre 1964 et 1988. « Le Brésil avait le droit de connaître la vérité, les nouvelles générations ont le devoir de connaître ce passé et surtout nous, qui avons lutté et perdu des compagnons, voulions savoir» a dit la présidente qui a été torturée et emprisonnée pendant trois ans jusqu’en 1972.

    La présidente a d’autre part souligné que l’instauration de la Commission «a été une décision de l’Etat brésilien et non d’un gouvernement. Nous venons de franchir une étape, il faudra décider à présent de la suivante». Car la principale conclusion de ce Rapport est d’affirmer que les crimes commis (morts, tortures, disparitions forcées, occultations de cadavres et prisons arbitraires) sont bien des Crimes contre l’Humanité et qu’il n’y a donc pas de prescription de temps. Le Brésil était sorti en 1985 de la dictature grâce à une Loi d’Amnistie exigée par les militaires et qui empêchait toute procédure judiciaire future.

    6100 plaintes pour tortures
    Mais le Rapport contredit d’une part cette « protection » et désigne d’autre part 377 responsables pour ces crimes. Tous les généraux devenus Présidents sont cités: Humberto Castello Branco (1964-1967), Arthur da Costa e Silva (1967-1969), Emílio Garrastazu Médici (1969-1974), Ernesto Geisel (1974-1979) et João Figueiredo (1979-1985). Sont également reconnus responsables les ministres des Trois Armées, les responsables des services d’intelligence et bien sûr, les meurtriers ou tortionnaires directs (258 noms) des 474 victimes dont le rapport détaille à chaque fois la tragique histoire. Sur les 377 responsables de Crimes contre l’Humanité, 139 sont aujourd’hui décédés mais 196 sont toujours vivants (d’une moyenne d’âge de 82 ans) et susceptibles d’actions judiciaires. Le Rapport détaille trente techniques de torture utilisées de façon systématique pendant la dictature et affirme que près de 300 militaires brésiliens ont reçu des «formations en torture» par leurs homologues américains dans l’École des Amériques installée au Panama. La Commission aurait reçu 6100 plaintes pour des cas de tortures durant la dictature mais elle considère qu’environ 20 000 personnes ont été victimes de la torture. Elle a travaillé sans la participation des militaires qui ont refusé de témoigner aux audiences organisées spécialement pour eux.

    Les trois corps de l’Armée (Terre, Mer et Air) ont simplement fait savoir dans une missive dirigée à la CNV il y a un an qu’ils ne pouvaient «ni nier, ni affirmer l’existence des crimes». C’est désormais la Justice qui va s’emparer de ce Rapport pour d’abord étayer les 10 procès pour «disparitions forcées» actuellement en procédure et qui accusent 24 personnes citées dans le Rapport. Mais il est désormais fort probable que le Brésil suive le chemin mené par l’Argentine ou le Chili pour juger et condamner les responsables de ces crimes.


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