• Quatorze millions de mariages précoces par an volent leur enfance à des femmes

    Plus de 700 millions de femmes dans le monde ont été mariées enfants. Ces unions forcées sont un fléau en Afrique et en Asie, notamment.

    L’enlèvement de jeunes filles aussitôt mariées à des combattants par Boko Haram au Nigeria ou par le groupe Etat islamique (Daech) en Irak et en Syrie a jeté, dans sa brutalité, un éclairage cru et spectaculaire sur une pratique courante dans de nombreux pays: les mariages contraints auxquelles sont soumises 14 millions de filles dans le monde chaque année. Aujourd’hui, elles seraient ainsi 700 millions de femmes dont l’enfance a été volée. Pour plus d’un tiers (250 millions) elles l’ont été avant l’âge de 15 ans, selon une étude publiée cet été par l’Unicef.

    Un tiers des cas en Inde

    Ce fléau ne laisse pas indifférent, les acteurs de terrain et la communauté internationale. Dans la région de Djazira au nord-est de la Syrie - une zone où l’Etat islamique pratique le mariage précoce et forcé - les autorités autonomes ont publié dimanche un décret interdisant le mariage des jeunes filles avant 18 ans, en réponse à Daech. Le prochain sommet de la francophonie qui se déroulera à Dakar les 28 et 29 novembre se consacrera à la question des «femmes et des enfants». L’éducation et la mise en place de normes sociales pour faire reculer la pratique des mariages précoces et valoriser la scolarisation des filles seront au cœur des débats. En Afrique, de plus en plus d’ONG et d’associations travaillent pour faire évoluer les choses, selon le magazine Jeune Afrique.

    L’été dernier, l’Unicef (Fonds de l’ONU pour l’enfance) a publié un rapport détaillé sur le sujet, à l’occasion du «Girl summit 2014» à Londres. Le constat est d’abord géographique: la plupart des enfants dont le mariage est arrangé par la famille vivent en Asie du Sud (42%) et un tiers en Inde; vient ensuite l’Afrique avec près d’une fillette sur deux mariée avant sa majorité au Niger, en Centrafrique et au Tchad. Mais on constate, plus près de nous, la persistance de ces unions précoces, en Moldavie, par exemple. L’Unicef note que «c’est moins la tradition que les conditions économiques qui poussent les parents à chercher très tôt un mari à leurs filles» dans des pays où une grande partie de la population est pauvre.

    Battues et rejetées

    Les conséquences de ces unions précoces sont «désastreuses», souligne l’Unicef dans son rapport. Les filles sont souvent enceintes dès les premiers mois de leur puberté. Ce qui augmente le risque de grossesses prématurées. Faute de soins, elles sont également plus exposées à la mortalité maternelle. Selon l’International Center for Research on Women, le taux de mortalité augmente de 30% quand la mère est mineure. En outre, faute de prévention et d’éducation, les cas de maladies sexuellement transmissibles et de sida sont nombreux. Et si les jeunes filles refusent le mariage arrangé, elles sont parfois battues et souvent rejetées par leurs familles. Socialement, elles quittent enfin l’école très tôt.

    Commerce de fillettes

    Dans ce contexte, les enlèvements et le commerce de fillettes pour les marier ou l’esclavage sexuel de mineures passe plus inaperçu. Si l’existence d’un réseau d’esclavage sexuel par le groupe Etat islamique dénoncé par l’ONU en septembre est mise en doute par certains experts, le commerce de filles avec les pays du Golfe est dénoncé comme avéré par l’Unicef. Selon l’organisation, «pour s’enrichir, des parents monnaient leurs filles (plus elles sont jeunes et plus elles se vendent cher dans les Emirats)». La seule note positive de ce tableau bien sombre est la baisse régulière du pourcentage de filles mariées avant l’âge de 15 ans. Ainsi au Nigeria -le pays où sévit Boko Haram - le pourcentage de femmes mariées avant 18 ans (l’âge légal retenu dans de nombreux pays), est passé de 56% à 43% en vingt-cinq ans. Mais par l’effet de la démographie, le nombre de ces femmes a cependant augmenté de 2 à 3 millions selon le rapport «Ending child mariage» de l’Unicef.


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